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Dans les années 90, la décision de faire passer une ligne électrique à Très Haute Tension entre la France et l'Espagne était prise. Il restait à passer à l'action après avoir choisi un lieu qui était le Val Louron.
Mais la population locale ne l'entendait pas ainsi. Le Louron avait beaucoup investi dans le développement touristique avec la rénovation de petites églises romanes et le loisir de nature avec le ski, la randonnée, le VTT, le parapente, etc... Une opposition à ce projet qui allait défigurer pour toujours la vallée s'est organisée de manière efficace.
Mais EDF résistait. Et puis le miracle est arrivé très rapidement. Voici un petit morceau de cette histoire de l'abandon d'une THT dans les Hautes-Pyrénées mais pas dans les Pyrénées.

- Le contexte politique

A cette époque, Juppé était premier ministre (1995)
Corrine Lepage, Ministre de l'environnement
Jean Dussour, Préfet
Josette Durieu, sénateur (elle l'est toujours) socialiste
Tous les élus locaux du Val Louron sont socialistes

- Les "pour" et les"contre"

A cette époque tout le monde était contre la THT (un peu comme aujourd'hui contre la TCP). Il y avait des manifestations, des pétitions, des réunions qui n'avaient pour effet que de bader le pèlerin... mais rien de concret.
Certains élus (dont un national assez important) commençaient à recevoir des "dédommagements" et "honoraires" pour services rendu à EDF. C'est ainsi que la station de Nistos-Cap Nesté aurait été construite avec un chèque de 3 MF d'EDF.
Je passe sur les détails de cette construction dont la presse s'est fait l'écho en son temps: routes sur terrains privés non acquis, construction sur une commune non "dédommagée", procès, etc...

- Le déclenchement de l'arrêt de la THT

Jean Dussour était un mordu des sports de nature: montagne, cheval, vtt, ski, escalade, parapente... qu'il faisait régulièrement avec CRS, Gendarmes et son conseiller technique, guide de haute montagne, Modeste Crampe. Il connaissait bien le Val Louron.
Un jour Corinne Lepage vient à Tarbes pour je ne sais plus quelle raison. Sur le tarmac de l'aéroport il lui dit: "pour le Louron, il faut faire quelque chose pour qu'il n'y ait pas de THT. Il faut en parler à Jupé".
Quelques semaines plus tard, Jupé arrive à Tarbes avec Corinne Lepage et partent dans le Louron. Pas de chance: un brouillard terrible. Mais le Louron ne manque pas de ressource: visite de quelques églises, de structures d'activités et de vacances. Et Juppé décide: j'en ai assez vu. Préparez quelque chose en vue d'assurer la protection des lieux.

- Le début de la procédure de classement du Haut Louron

A partir de là, tout va vite. Il est décidé une procédure de classement du Haut-Louron compte tenu du caractère sauvage et remarquable de la montagne. La commune de Loudenvielle prend des dispositions quand aux limites et une délibération. Quelques jours plus tard la commission départementale des sites se réunissait (j'y participais) pour donner un avis favorable.
Le principe: si le Haut-Louron était classé, c'est à dire toute la frontière entre les Hautes-Pyrénées et l'Espagne, il était juridiquement impossible de faire passer la THT.

- Tout a failli capoter

Le jour de cette réunion historique, Patrice de Bellefon m'attendait dans la cour de la Préfecture et me dit:

En fait j'en avais eu vent... et j'avais des billes dans mon sac.
Au cours de la séance où le CAF était absent, de Bellefon présente son contre projet en prétendant qu'on ne pouvait pas classer le Haut-Louron parce que "les montagnes étaient sans intérêt".
Je demande la parole et là tout s'écroule pour Patrice:

Patrice a plié ses affaires, est parti et ne s'est plus jamais représenté à cette commission.
Le Conseiller Général Pellieu avait fait une intervention brillante et remarquable pour défendre ce classement. Il a d'ailleurs toujours été de tous les combats, avec beaucoup de conviction contre cette THT. Il est vrai qu'il a toujours une vision touristique très réaliste pour cette vallée et il a su passer à l'action.
L'unanimité était maintenant acquise.
Mais pourquoi donc n'y avions nous pas pensé avant???? Curieux non?

- La Phase ultime

Après l'avis de la commission départementale des sites, restait celui de la commission supérieure des sites où siégeait encore Patrice de Bellefon (il avait le siège laissé vacant par Gaston Rébuffat après son décès et qui dirigeait la collection des "100 plus belles courses" aux Ed. Denoël).
C'est le Préfet Dussour en personne qui est allé défendre le dossier avec les arguments pour démonter éventuellement de Bellefon.
L'avis positif a facilement été donné.

Juppé a pu signer un arrêté de classement

- EDF Come back

L'EDF coincé sur le Louron a tenté de séduire la vallée des Gaves et Gavarnie. Quelques jours après tout ceci, la sous-préfète d'Argelès est sollicitée pour aller à Gavarnie a une réunion entre EDF et le maire.
Gros coup de colère du Préfet Dussour (j'en étais le témoin oculaire): ici l'Etat c'est moi, et l'Etat dit non a une THT dans les Hautes Pyrénées donc EDF ira voir ailleurs et l'Etat n'ira pas à cette réunion qui de toute manière ne se fera pas.
L'épisode THT dans les Hautes-Pyrénées était terminé.

- Conclusion

Quand un Préfet a une certaine volonté d'aboutir, un esprit d'ouverture et de concertation et une bonne dose d'intelligence, les bonnes décisions sont prises!
"Là où il y a une volonté, il y a un chemin"
Mais ils sont rares les Dussour, son successeur fut bien autre chose.

Louis Dollobr> 22/02/2004

Nota: chacun a son niveau de lutte a vécu l'abandon de la THT à sa manière. A chaque niveau, une histoire. L'histoire des autres nous intéresse aussi.

- La THT, c'est pas fini!

Le projet de ligne à Très Haute Tension (THT) n'est pas abandonné. La France paie chaque année des dédomagement à l'Espagne pour non respect de ses engagements de fourniture. Après avoir imaginé un passage par Luchon, puis par l'Ariège et le Val d'Aran ou l'Alt Anéou, le projet se polarise actuellement sur les Pyrénées-Orientales où les actions d'hostilités sont importantes.

- Les opposants à une ligne THT interpellent le président de Catalogne

Prades, 25 août 2004 (AFP)
Une délégation de 70 personnes opposées aux projets de construction d'une ligne électrique à très haute tension (THT) entre la France et l'Espagne ont interpellé mercredi à Prades (Pyrénées-orientales) le président socialiste de la Generalitat de Catalogne Pascual Maragall, a constaté un journaliste de l'AFP.
M. Maragall, qui rendait visite à l'université catalane d'été organisée par diverses associations catalanes, a déclaré à la délégation et à la presse qu'il avait "besoin d'électricité pour alimenter la Catalogne", mais qu'il était "opposé à un passage aérien et favorable à une ligne enterrée".
"Même enterrée, une ligne de 400.000 volts dénaturerait le paysage car il faudrait réserver une emprise pour sa maintenance et en outre les effets de la THT sur la santé sont très controversés", a déclaré à l'AFP une de ses responsables, la maire de Saint-Laurent de Cerdans, Isabelle Quintane. "La discussion n'en est qu'à son début. Le projet a été refusé au Pays basque, dans les Hautes-Pyrénées, nous espérons convaincre M. Maragall qui a été élu dans le cadre d'un pacte avec les Verts notamment, de nous soutenir", a ajouté Mme Quintane.
Le collectif français anti-THT compte sur l'appui des élus locaux de Catalogne dont plusieurs se sont déjà prononcés contre la THT, selon Mme Quintane.

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