L’objectif de ce rapport était de compiler et d’examiner les données concernant les attaques de loup sur l’homme au cours des derniers siècles. Cette revue ne se veut pas exhaustive
mais les sources utilisées ont été très larges.
Celles-ci ont été principalement de deux ordres: d’une part les revues littéraires (scientifiques, médicales, historiques…) qui recensaient des cas bien documentés, d’autre part les apports
de personnes ressources (biologistes travaillant sur les canidés dans l’hémisphère nord). Les données issues de la seule tradition orale ont été écartées car considérées comme trop peu fiable.
Résumé d'une
étude de Linnell sur les attaques de loup sur l'homme - The fear of wolves: a review of wolf attacks on humans. Linnell et al., Norsk Institut for Naturforskning. 2002, 65p.
Quatre cas de figure sont observés:
1. contamination par le virus de la rage: c’est de loin le cas le plus fréquent. Le loup n’est pas un réservoir de la maladie (i.e le loup n’est pas une espèce au sein de laquelle le virus de la rage peut se maintenir et ainsi contribuer à la pérennité d’une épidémie ; en Europe de l’ouest le vecteur sauvage principal de la rage est le renard, ndlr). Cependant, un loup enragé peut développer un forme dite «furieuse» qui, associée à ses capacités physiques (force, vitesse de déplacement), le rend particulièrement dangereux. Les cas d’attaques de loup enragé sont en nette diminution en Europe de l’ouest et en Amérique du Nord suite à la régression importante (voire l’éradication) de la rage. Ils persistent encore en Asie et dans une moindre mesure en Europe de l’est. Les cas mortels sont cependant en diminution depuis la mise au point des traitements antirabiques à la fin du 19ème sièc le. Les auteurs rappellent de plus que la principale source de contamination de l’homme reste le chien.
2. attaques «défensives»: elles sont peu fréquentes et aucun cas mortel n’a été recensé. Elles concernent essentielle ment des bergers qui ont voulu défendre leurs troupeaux avec des moyens rudimentaires (bâton, pierre…). La littérature regorge a contrario de cas où des loups ont été capturés, voir déterrés de la tanière, sans avoir attaqué le piégeur.
3. comportement de «prédation». Ces attaques sont rares. De plus, de nombreux cas concernent des données historiques qui peuvent être soumise à controverse (exemple: cas du Gévaudan en France). Le loup ne considère en effet pas l’homme comme une proie potentielle sauf dans des cas exceptionnels où les conditions écologiques sont radicalement modifiées (en particulier absence de proies sauvages, utilisation importante des proies domestiques, enfants laissés seul pour la garde des troupeaux). Dans ces conditions, certains individus peuvent développer un comportement d’attaque essentiellement orienté sur des cibles faciles (enfant). Ces situations étaient rencontrées en Europe avant le 20ème siècle, elles se rencontrent toujours en Asie (en particulier en Inde où des cas sont toujours rapportés). En Europe de l’ouest seuls 3 épisodes d’attaques ont été rapportés au cours du 20ème siècle (1959, 1974 et 1975). Ils sont tous survenus en Espagne dans la région de la Galice, région agricole où les loups se nourrissent essentiellement sur les proies domestiques et les décharges. En tout, huit personnes (dont sept enfants) ont été attaquées, quatre enfants sont morts.
4. comportement d’accoutumance. Ces attaques sont rares. Elles ont souvent lieu dans des zones protégées où certains individus peuvent perdre la peur de l’homme. Des cas récents (années 1990) ont en particulier été rapportés dans des parcs nord-américains. Aucun cas mortel n’a été recensé.
En définitive, des attaques sur l’homme existent mais leur fréquence est faible et de plus essentiellement liée à une contamination rabique. Si l’on compare la fréquence des attaques de loup sur l’homme, avec celles engendrées par d’autres carnivores (dingo, grizzli, tigre, couguar…), le loup apparaît comme une des espèces les moins dangereuses au regard d’une part de ses capacités physiques et d’autre part de l’évolution de son aire de répartition et de ses effectifs. Ainsi, au cours des 50 dernières années, 9 morts ont été recensés en Europe (dont 5, à l’est, liés à des loups enragés) pour une population lupine estimée entre 10 et 20.000 individus; 8 morts recensés en Russie (4 liés à la rage) pour 40.000 loups ; zéro mort en Amérique du nord pour une population de 60.000 loups.
Les auteurs terminent enfin leur rapport sur un certain nombre de recommandations à suivre pour faire encore diminuer cette fréquence:
1. continuer et/ou améliorer les programmes de lutte contre la rage,
2. maintenir des réservoirs de proies sauvages, en particulier par un aménagement des prélèvements, tout en restreignant l’accessibilité aux troupeaux domestiques (mesures de protection)
3. maintenir le comportement craintif des loups, en éliminant tout individu qui deviendrait «familier».
Source: Réseau loup / ONCFS - Quoi de neuf? n°9 - juillet 2002 - page 8 /18