Les écologistes tentent de rassurer tout le monde en niant des évidences. Les cas d'attaques ou agression sur l'homme existent bien tant en Amérique du nord qu'en Europe centrale.
Mais personne n'en parle.
On diabolise volontiers le carnassier, de retour partout dans les Alpes.
Depuis toujours, le carnassier fait peur. Et il y a bien quelques raisons à cela, comme le démontre magistralement l'auteur de l'étude Histoire du méchant loup.
Jean-Marc Moriceau a en effet pu recenser plus de 3.000 attaques du prédateur sur l'homme entre le XVe et le XXe siècle dans 85 départements français.
Un léger frisson sur la nuque, c'est ce que suscite souvent l'évocation du loup. La faute au Petit Chaperon rouge, aux récits de carnages dans les bois, aux images de sang innocent
répandu sur la neige.
Le carnassier fait peur.
A cela il y a bien quelques raisons, comme le démontre magistralement l'historien français Jean-Marc Moriceau, dans son livre "Histoire du méchant loup".
Son ouvrage destiné au grand public voudrait dédramatiser le conflit entre partisans et détracteurs du quadrupède, y compris en Suisse où le loup a beaucoup fait parler de lui l'hiver 2007.
Mi-mars, on aurait aperçu un individu à 1,5 kilomètre seulement d'un village fribourgeois. En novembre, le gouvernement valaisan a ordonné l'abattage d'un prédateur qui avait
aiguisé ses crocs sur plus de trente moutons. Eleveurs et défenseurs de la nature se sont affrontés.
La bête empaillée trône aujourd'hui dans le bureau du conseiller d'Etat Jean-René Fournier comme un trophée. Pourquoi ce besoin de revanche à prendre sur le loup?
Les explications de Jean-Marc Moriceau dans la suite de la page.
Depuis son retour naturel en 1993 et ses premières attaques sur le bétail un an plus tard, l'image du carnassier a été revalorisée. La conception de la place de l'homme dans l'univers a changé. On se soucie désormais de préserver la biodiversité. Le loup en bénéficie. Du coup, des tensions apparaissent entre les éleveurs de moutons, qui gèrent au quotidien les problèmes que pose la présence du prédateur, et les autorités chargées de préserver l'environnement.
Oui, dans une certaine mesure. Pour l'heure, j'ai recensé 3.050 agressions ayant entraîné presque toujours mort d'hommes, du XVe au XXe siècle. En étudiant les dépôts d'archives de 85 départements français, à travers, notamment, les registres des paroisses consignant les décès où l'extrême-onction n'avait pu être administrée. Et grâce à l'aide de généalogistes dans toute la France, j'ai pu dresser un portrait scientifique des attaques du loup contre l'homme.
Oui.
J'estime que pour le XVIesiècle, on ne peut avoir connaissance pour l'instant que d'une très petite partie du total (5% environ). Cela va en augmentant jusqu'au XIXe, où j'arrive à
saisir peut-être entre 15 et 35% de la réalité.
Mon étude s'arrête en 1918, avec la dernière agression supposée.
Si l'on examine les chiffres, le risque que représente ce carnassier est très faible statistiquement. Il cause beaucoup moins de décès que les chutes ou la noyade.
A l'échelle nationale, c'est insignifiant. Mais à l'échelle d'une région, ces carnages étaient bien plus sensibles et terrifiants. Ils marquaient les esprits pendant des
générations.
Auteur: Pascale Zimmermann
Source: 24heures.ch du 18 mai 2007