Le nombre de loups en France fait toujours débat. Entre les chiffres officiels des la population de loups dont l’évaluation est difficile à comprendre et la perception que peuvent avoir les éleveurs au contact de la réalité du terrain, l’incompréhension est totale. Constater également, qu’officiellement cette population de loups évolue très peu, que les chiffres annoncés ne représentent pas la progression officielle de 20 % alors que les prédations suivent une courbe d’évolution exponentielle, laisse planer l’ombre du doute et de la manipulation.
Dans l’interview ci-dessous, Eric Marboutin confirme ce qu’il a toujours dit: "un rythme de 20 % par an". Dans ces conditions, et compte tenu des naissances du printemps / été 2013, en octobre 2013 nous devrions avoir aux alentours de 400 loups et non 240 (évaluation à la sortie de l’hiver 2012-2013) et nous n’aurions jamais dû avoir une stabilité en 2012 et une baisse en 2013.
Pourquoi une telle différence?
La raison est essentiellement politique et non scientifique. La science, issue d’une unique administration, l’ONCFS, plus proche des écologistes que des chasseurs qui la finance, n’est ici qu’une sorte de faire valoir. Politiquement, pour la mouvance écologiste, il convient d’entretenir le mythe de la «population de loups en danger». Ce mythe est indispensable pour:
1/ développer les meutes et, par la même occasion les prédations et l’abandon des territoires par les éleveurs et bergers
2/ Installer la politique de «re-wilding» c’est-à-dire d’ensauvagement des territoires décidée en 1997 par le WWF / UICN
3/ Justifier l’existence de ces associations et, par la même occasion, des subventions irraisonnables pour entretenir une véritable administration de l’écologie punitive qui surveille et fait condamner tout ce qui ne leur convient pas.
L’interview d’Eric Marboutin présente l’avantage de nous montrer que les éleveurs, élus, organisations syndicales, etc… ont été abusés quant à l’évolution de la population de loups. Avec ce chiffre officiel de progression, même s’il y a tout lieu de penser qu’il est supérieur, ne pourra plus permettre autant de manipulations et permettra d’affirmer qu’en 2014 le chiffre de 350 loups est largement dépassé. En conséquence, des mesures doivent être prises sur la base d’une population viable, quoique beaucoup trop importante pour être compatible avec les activités pastorales, dont le surplus peut faire l’objet d’abattages sans mettre en danger l’avenir de l’espèce en France.
Louis Dollo, le 30 octobre 2013
Venu des Alpes et des Vosges, le loup multiplie depuis mai les attaques dans les élevages ovins de l'Aube et de la Haute-Marne. Jusqu'où peut-il aller? Comment s'implante-t-il sur de nouveaux territoires? Réponses avec Eric Marboutin, responsable des études sur les loups et les lynx à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS).
Eric Marboutin: Les loups, réapparus en France en 1992 après avoir été massivement chassés et empoisonnés, sont aujourd'hui présents dans 24 départements. Les animaux sédentarisés sont essentiellement localisés dans les Alpes, mais aussi dans les Pyrénées-Orientales, la Lozère, et le sud du massif vosgien. Des loups isolés ont également été aperçus en Aveyron, dans le Gers, dans l'Aube et la Haute-Marne.
La population de Canis lupus, qui regroupe autour de 250 individus, croît en France à un rythme de 20 % par an. Elle se développe, comme ailleurs en Europe, en raison de la croissance des forêts, de la nourriture abondante et diversifiée (le nombre d'ongulés sauvages est en hausse depuis trente ans) et d'un statut de protection favorable, avec la convention de Berne de 1979 et la directive Habitat Faune Flore de 1992.
Le loup est un super-prédateur: il n'a pas de concurrence avec d'autres espèces. Néanmoins, la croissance actuelle de cette population ne se situe pas à son maximum biologique: avec des paramètres de survie et de fécondité au maximum théorique, le taux de croissance peut atteindre 40 %.
Des loups quittent la meute à deux périodes de l'année: avant l'hiver, quand il y a une concurrence pour l'alimentation au sein de la meute car les jeunes de l'année ont besoin de presque autant de nourriture que les adultes ; et à la fin de l'hiver, au moment du rut, quand il y a conflit pour accéder au statut de reproducteur. Ces animaux cherchent alors un nouveau territoire et peuvent parcourir 40 à 50 km par nuit. Au final, ils s'installent en moyenne à 200 km de la meute d'origine.
On ne sait pas pourquoi un loup s'installe quelque part si ce n'est qu'il cherche un territoire avec de la nourriture. Son régime alimentaire est composé de 75 % à 90 % d'animaux sauvages (comme les chevreuils ou les chamois) et de 25 % à 10 % d'animaux domestiques (des moutons et, de temps en temps, de jeunes bovins et caprins). Il mange en moyenne 2 à 3 kg de viande par jour, mais peut jeûner plusieurs jours et compenser ensuite.
Mais le loup peut biologiquement vivre n'importe où: dans les montagnes, les forêts, les grandes plaines agricoles, les déserts froids, les régions chaudes, etc. Il n'y a pas grand-chose qui l'arrête: il n'est par exemple pas inféodé aux forêts dans ses déplacements. C'est vraiment une espèce "plastique" qui s'adapte à tous les écosystèmes. C'est d'ailleurs le mammifère terrestre qui a eu l'aire de répartition historique la plus large au monde: l'hémisphère Nord.
Les loups peuvent passer près de zones habitées mais ce n'est pas quelque chose qu'ils recherchent: il n'y a pas assez de nourriture dans les villes et, comme tous les animaux sauvages, ils craignent la présence humaine et le bruit.
Néanmoins, au XVIIIe siècle, il y avait des loups partout en France, y compris près de Paris, dans les forêts de Rambouillet, de Versailles ou en Sologne. L'espèce a finalement reculé en raison de la concurrence avec l'homme.
Auteur: Audrey Garric Chef adjointe du service Planète/Sciences du Monde
Source:
Le Monde du 24 octobre 2013