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Le 5 août dernier, dans une lettre ouverte au Président de la République, l’ADDIP a dévoilé, preuve à l’appui à propos d’ours et de Pyrénées, un scandale d’État: dans les années 90, le Ministère de l’Environnement en la personne d’un haut fonctionnaire et l’ONCFS avaient monté une escroquerie visant à faire croire à l’UE que les Pyrénéens étaient d’accord pour réintroduire des ours alors qu’ils savaient que c’était l’inverse. L’ADET-Pays de l’Ours, présidée aujourd’hui par M. Arcangeli, avait été alors créée à cet effet:
«Petite structure bâtie pour l’occasion permettant ainsi au projet d’être moins parisien /…/ pendant que le projet «lourd» de réintroduction évoqué par ailleurs continuerait d’être discuté» ( Note de G. Simon pour M. le Directeur de Cabinet du 28-01-1991).
Sur le site européen des programmes LIFE, instrument financier de l’UE pour l’environnement et la conservation de la nature, de nouveaux documents confirment l’escroquerie

Entre 1993 et 95, le même Gilbert Simon, devenu alors Directeur de la Nature et des Paysages au Ministère, a été en tant que fonction, bénéficiaire de projets LIFE-Europe pour un montant total de 3.171.733€, en tenant compte de l'inflation = 4.408.490€ de 2013 = 28.917.798 francs, ce qui est énorme!!!
Dans ce total les subventions européennes se montaient à 2.378.800 € (15.603.905 francs des ces années-là), le reste étant abondé par la France.

Or ces programmes présentaient ainsi le massif: «Jusqu’à récemment encore zone isolée et inaccessible, / Until recently a remote and inaccessible area/ les Pyrénées … etc.».

M. Simon, donc le Ministère qu’il représentait, montait ainsi une escroquerie à deux volets: d’un côté, présenter le massif comme «récemment encore zone isolée et inaccessible» qui devenait alors terrain ouvert à tous les fantasmes d’ensauvagement, et dans la zone où les ours seraient importés l’ADET, «petite structure moins parisienne», censée regrouper les quelques indigènes qui, depuis peu donc, avaient eu la curieuse idée de venir peupler cet isolat inaccessible. Cela, redisons-le, alors qu’à tous niveaux les informations de terrain dont il disposait lui confirmaient le refus pyrénéen des réintroductions.

Sans cette escroquerie d’État, l’UE n’aurait jamais réintroduit les ours slovènes dans les années suivantes de la même façon qu’en 1996 elle a annulé les autres réintroductions prévues lorsqu’elle s’est rendue compte de cette escroquerie à l’acceptation sociale: «un second plan de réintroduction a été annulé à cause de l’opposition des populations locales» (1).

Il revient au Ministère aujourd’hui d’assumer les suites de ces escroqueries et de réparer. Il n’y a qu’une façon de le faire: revenir à ce que serait la situation sans ces mensonges et mépris à la base de tous ces programmes LIFE, enlever les ours, les placer en un lieu où ils ne nuiront à personne.

Le 16 août 2013

(1) LIFE and European Mammals: Improving their conservation status, © European Union, 2011 – p. 42

- En 1993-95 le Ministère de l’Environnement vendait les Pyrénées et l’ours pour 2.378.800€

En 2013, il doit rendre des comptes et rattraper cette escroquerie

De 1993 à 1995, une série de programmes LIFE-Europe va concerner directement les Pyrénées, LIFE étant l’instrument financier de l’UE pour l’environnement et la conservation de la nature. Tous sont rédigés de façon similaire et le 1° d’entre eux ( LIFE93 NAT/F/011805) explique pourquoi: «Ce projet fait partie d’un programme à plusieurs bénéficiaires. C’est la raison pour laquelle les résumés sont les mêmes pour chaque sous projet.»

En effet, les résumés de ces projets tels qu’ils sont disponibles (1) commencent tous ainsi: «Jusqu’à récemment encore zone isolée et inaccessible, / Until recently a remote and inaccessible area/ les Pyrénées sont un des derniers refuges en Europe pour quelques uns de nos mammifères et oiseaux les plus spectaculaires et menacés: l’ours brun, le bouquetin des Pyrénées, et le gypaète barbu.»

En tout 10 projets basés sur cette même analyse des Pyrénées comme un lieu hors du temps, hors du monde, où l’empreinte de l’homme serait trop récente pour avoir transformé ce refuge quasi sauvage.

Insondable crétinerie alors que depuis 6000 ans les activités humaines, pastoralisme en tête, mais aussi métallurgie dès la fin du néolithique, exploitations forestières, ont fait de ce milieu tout sauf un milieu «naturel», encore moins sauvage. Pour la pastoralisme, Pedro Montserrat au Centre d’Étude Pyrénéenne de Jaca a montré depuis plus d’un demi siècle comment il a contribué à forger les paysages pyrénéens en y créant une biodiversité unique. Depuis, de nouvelles méthodes de recherche en archéologie des paysages sont venus confirmer ces conclusions en affinant les chronologies, les évolutions du milieu.

Mais présenter ainsi le massif pour ce qu’il n’est pas était un petit commerce qui rapportait gros, et pas plus en France qu’en Espagne (État central et communautés autonomes) les «responsables» politiques qui acceptèrent de tels programmes se gardèrent bien alors d’expliquer aux «indigènes» au nom de quelle image on vendait ainsi ce massif et eux-mêmes. Le tableau suivant fait le bilan comptable de ces marchands du temple:

Les 3 documents de programme LIFE menstionnés sur ce tableau (en bleu) sont consultable en lien en bas d'article.

Comme par hasard, en France, la Direction de la Nature et des Paysages au Ministère de l’Environnement, est le plus gros bénéficiaire de cette supercherie, en tout 2.378.800€ de contribution UE, 15.603.905francs, plus du tiers du total de ces contributions! Budget total avec l'apport français indispensable pour que la subvention UE soit versée: 3.171.733 €, 20.805.204francs, en tenant compte de l'inflation: 3.171.733€ de 93 = 4.408.490 € de 2013 = 28.917.798 francs ce qui est énorme!!!

Or, depuis juin 1992 le Directeur concerné était M. Gilbert Simon, grand spécialiste en escroquerie à propos d’ours et de Pyrénées.

L’année précédente, encore simple Conseiller technique au Ministère, alors qu’il connaissait l’opposition pyrénéenne à toute réintroduction des ours, il décida de la cacher à l’Europe en faisant croire l’inverse à partir d’ «une petite structure bâtie pour l’occasion permettant ainsi au projet d’être moins parisien /…/ pendant que le projet «lourd» de réintroduction évoqué par ailleurs continuerait d’être discuté» ( Note pour M. le Directeur de Cabinet du 28-01-1991). Ce sera l’ADET – Pays de l’Ours, créée au cours de cette année 1991.

Dans les mois et années suivants l’Administration régionale de l’Environnement (DIREN) et l’antenne locale de l’ONCFS, continuèrent à informer le Ministère et son Conseiller de cette opposition en soulignant que l’ADET ne représentait qu’elle même et surtout pas l’avis général. Mais M. Simon avait décroché le jackpot européen sous ses deux versions: «récemment encore zone isolée et inaccessible» pour l’ensemble du massif, et dans la zone où les ours seraient importés cette «petite structure moins parisienne», alors censée regrouper les quelques indigènes qui, depuis peu donc, avaient eu la curieuse idée de venir peupler cet isolat inaccessible.

Parfaite cohérence du stratagème, mais parfaite stupidité aussi.

Parce que cette image fausse de la réalité explosa quand, justement, elle fut confrontée à la réalité. Les Pyrénées n’étaient pas du tout cette image qui rapportait si gros. Et en 1996, un autre programme LIFE, LIFE96 NAT/F/004794, programme non abouti, remettait les pendules à l’heure:: «la réintroduction de 3 ours supplémentaires a été abandonnée suite à une enquête d'opinion auprès des représentants locaux et des parties prenantes.» Ce qu’en 2011 un bilan de l’ensemble des programmes Natura 2000/LIFE-Europe consacrés aux mammifères résume ainsi: juste après les réintroductions de 1996, «un second plan de réintroduction a été annulé à cause de l’opposition des populations locales» (2).

En juin 2013 encore , confirmation de ce refus européen de réintroduire parce que les Pyrénéens ne sont pas d’accord: «Une forte opposition locale peut signifier que des projets de nouveaux lâchers risquent de ne pas obtenir le feu vert. Le gouvernement français compte plutôt atteindre la viabilité à travers la reproduction des ours existants. Cependant, des problèmes liés à la consanguinité peuvent se produire si aucun autre ours n’est introduit. La population pyrénéenne d'ours bruns reste donc menacée, et seul un changement important dans les attitudes locales à la présence de l'ours dans les Pyrénées peut la sauver.» (3)

C’est bien parce qu’un tel changement n’est pas à l’ordre du jour que l’UE, ce même mois de juin 2013, n’a pas donné «le feu vert» à un projet hispano-catalan lors même qu’il reposait sur ce risque de consanguinité.

Sans les supercheries méprisantes pour les Pyrénéens, construites et acceptés par le Ministère de l’Environnement et l’ONCFS dans les années 90, l’Europe n’aurait pas davantage importé alors d’ours slovènes qu’elle ne l’a fait depuis et pour les mêmes raisons: non, les Pyrénées ne sont pas un désert peuplé depuis peu, et oui, les Pyrénéens s’opposent à ces importations.

Il revient au Ministère aujourd’hui, comme au Président de la République qui, constitutionnellement, assure «le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État», d’assumer les suites de ces escroqueries. Il n’y a qu’une façon de le faire: revenir à ce que serait la situation sans ces mensonges et mépris à la base de tous ces programmes LIFE, enlever les ours, les placer en un lieu où ils ne nuiront à personne.

L’inverse serait faire de mensonge et mépris le fonctionnement normal de la gouvernance dans un pays où le bas peuple n’aurait alors qu’un droit: tout accepter, même cela, courber l’échine, mais continuer bien sûr «démocratiquement» à voter … pendant qu’on le vendrait à l’UE pour quelques millions d’euros.

B. Besche-Commenge ASPAP/ADDIP – 14 août 2013

Notes:

(1) moteur de recherche sur le site http://ec.europa.eu/environment/life/project/Projects/index.cfm

(2) LIFE and European Mammals: Improving their conservation status, © European Union, 2011 – p. 42

(3) LIFE and human coexistence with large carnivores, European Commission and the Environment Directorate-General, © European Union, 2013 – pp. 14-16 http://ec.europa.eu/environment/life/publications/lifepublications/lifefocus/documents/carnivores.pdf

- Le contexte politique

Pour comprendre certaines décisions, il faut parfois se rappeler le contexte politique et ministériel. En fonction des partis au pouvoir des orientations différentes peuvent être prises et influer sur les décisions. Dans le cas des grands prédateurs, nous pouvons observer que les changements de tendance, droite ou gauche, n’ont strictement aucune influence sur le déroulement des importations d'ours. Ce qui peut laisser supposer que l’opération échappe totalement au «politique» et devient une affaire strictement administrative échappant à tout contrôle démocratique.