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Message de Nico et Mickaël
Les étapes non faites

Le 17 février, les étapes 3 et 4 avaient dû être abrégées. En raison du mauvais temps sur les Pyrénées centrales, ils sont revenus sur les Pyrénées-Orientales pour effectuer ce qui n'avait pas pu l'être avant.

Voici le récit de ces étapes.

Transis, trempés, notre début de traversée dans le Canigou nous avais mis à rude épreuve. Comme pour nous tester. Et c'était en plein brouillard et tempête, sur le Pla Guillem, que nous décidions de renoncer à ces étapes. C'était le 17 février. Aujourd'hui il fait chaud.

Et un temps splendide sur ces pentes qui nous semblaient dramatiques il y a si peu. Au grand jour elles se révèlent accueillantes, presque faciles. Plus sage (?) nous laissons la neige de l'Aneto et du Luchonnais se tasser, les avalanches se déclencher sans nous et nous reprenons le chemin de la mer. Un brusque retour en arrière. Pour ne rien laisser en chemin. Bien nous un pris.

Sous des températures méditerranéennes depuis le Col de Joux au-dessus de Vernet les Bains, à 1.100m, nous rechaussons les skis. Dur, après une semaine de Farniente et de festins culinaires, de faire refonctionner la mécanique. Avec les premières sueurs, les polaires fourrées dans le sac, revigorés par la fraîcheur d'un ruisseau au détour d'un chemin, les dénivelées s'égrènent. Et bientôt nous arrivons au refuge de Marialles que nous avions désespérément cherché dans une mer de nuage et de neige trois semaines avant. Il est là, tranquille. Mais le chemin pour l'atteindre depuis le Canigou n'est pas évident en Hiver. Peut-être par instinct, nous nous étions évité une longue galère dans les Brouchousses en choisissant de dormir au refuge Arago.

Aujourd'hui il faut encore monter. C'est tout là-haut, on l'aperçoit presque. Le très carcellaire

(?) refuge de Pla Guillem nous attend. La route forestière d'abord puis une raide trace nous mène au Col. C'est déjà la fin d'après-midi et une étrange couleur bleutée nappe les arbres, les ombres. La neige s'y miroite. J'espère que les photos seront belles. Au passage une revanche cynique et bien maigre mais à combien agréable sur les Brouchousses des Pyrénées: nous cassons quelques branches pour alimenter le feu du soir.

Le Chorten. Puis le Refuge. 2.270m. Il nous attend là. L'entrée est pleine de neige. Personne ne semble s'y être aventuré depuis. Et pour cause. Cela nous semble être le refuge de notre bagne. Vêtu de bâton, grand, froid, avec un trou dans la rare fenêtre où la neige semble vouloir reprendre son dû. Ce refuge ressemble à une geôle. Mais aujourd'hui il fait beau et le bois sec s'embrase du premier coup. Nous reprenons à tu-tête les chants que nous entonnions ce matin là en attendant vainement que le brouillard se dissipe, la neige cesse, le vent tombe.

Un lendemain de splendeur pure. Pas un nuage, pas un brin d'air. Le Grand Bleu. Le Grand Blanc. Et le Grand Plateau se dévoile. Et tout au bout, la longue Crête des Esquerdes de Rotja. Le Chorten du refuge nous accueille pour le recueillement du matin. Ce n'est pas tous les jours que nous en oublions de boire le thé pour voir les couleurs du matin.

La traversée des crêtes du Canigou jusqu'en Cerdagne est un bonheur pour les yeux. Nos muscles, toujours d'un avis différent, font le Dahut tantôt senestre quand nous traversons de longues pentes tranquilles avec l'arête à gauche. Tantôt dextre. Le contraire. On se prendrait l'envie d'avoir une jambe plus courte que l'autre!

Assis sur un rocher, au détour d'un col. Nous voyons la mer. Reflets au soleil du matin. Et ces montagnes d'Espagne qui se dévoilent entre des mers de brumes matinales. Magique. Dire que nous voulions faire cette étape la boussole à la main dans le brouillard! Nous louvoyons entre des traces de randonneurs et la neige qui se fait rare sur les bords de crête. Pour une pause saucisson de Vic (Espagne), tome des Alpes, comté de Paris nous passons côté sud. Le contraste est fort: c'est déjà le printemps. Pas de neige. Les champs en bas sont verts. Entre deux bouchées on perçoit même Prats de Mollo. Et devant nous le Pic de Costabone. Skis sur le sac on s'offre le luxe de parcourir sur le fil cette belle arête, tantôt grande croupe à vache, tantôt effilée de quartz blanc. Et un peu au hasard, après quelques petits sommets tout rond, catalans complètement où les fanions à foison montrent leur appartenance nous redescendons par une petite pente sur la station d'Ull de Ter. Après le silence de cette traversée, on tombe, au dernier virage, sur le bar de la station. Retour brutal à la civilisation. Mais prendre un bon verre au bar, au soleil à regarder passer de Belles espagnoles n'est pas pour nous déplaire. Nous irons jusqu'à prendre un téleski pour remonter au refuge d'Ull de Ter. Confort appréciable !

Le refuge d'Ull de Ter est un hôtel. Heureusement fermé en semaine. Un refuge d'hiver nous est ouvert. Il est petit (7 places) mais possède tout le confort que l'on peut souhaiter: eau courante, poële, bois à profusion. 4 Espagnols venus de Madrid (pour faire après 10 heures de route deux petits couloirs de 250m) se joignent à nous. On est complet. Super sympas ils nous offrent même une bouteille de Rioja (vin rouge d'Aragon) à boire ensemble. Ils connaissent un peu les Pyrénées: ils ont grimpé à Ansabère nous disent-ils. Ils ont fait le Spigolo! (94ème des 100 plus Belles des Pyrénées). Chapeau bas chers Espagnols!

Le lendemain le ciel est toujours beau. Mais déjà des signes que nous ne connaissons que trop bien indique une nouvelle perturbation à venir: vent du sud, nuage d'altitudes... Après une remontée facile et très jolie au Pic de la Vaca (Vache en Espagnol), premier pic que nous foulons sans déchausser les skis, nous entamons la traversée des arêtes passant par le Pic de Tres Nou Fonts et du Pic d'Eyne. Dans un fort vent de sud, nous remettons les skis sur le dos. Ici pas de neige. Elle ne peut pas se poser, tranquille. Le vent ne lui en laisse pas le temps. Et

enfourrés dans nos Gore-Tex nous montons ici un Pic, descendons là un Col. Chaque Col donne à droite, au nord sur une vallée française, à gauche au sud sur une vallée espagnole. Chaque sommet donne naissance lui à une arête parfois deux. Perpendiculaires à celle que nous suivons.

Par la dernière belle remontée sur le Pic des Tres Nou Fonts, à 2.860m, un panorama sur l'Espagne, les Pyrénées-Orientales et au loin l'Andorre nous attend. Descente sur le Pic d'Eyne puis le Col de Nuria où nous chaussons les skis. Dans une neige mi-cartonnée mi-dure péniblement nous réapprenons à faire des virages. La descente n'est pas fantastique par son plaisir du ski mais bien rigolote car pour une fois point de Brouchousses. Nous skierons sans déchausser, sans (presque!) prendre un caillou, du Col de Nuria à 2.800m jusqu'au village d'Eyne à 1.600m. Merci à tous les randonneurs en raquettes qui sont passés par-là et qui nous ont offert une trace glissante à souhait. Nous prenant pour des champions de Bobsleigh, dans un chemin entouré d'arbres, juste assez large pour laisser passer nous et nos sacs, tantôt se baissant, tantôt évitant un ruisseau, un caillou, nous arrivons un peu surpris que pour cette fois point de galère, tout se passe bien, et amusés sur les champs de la Cerdagne où une dernière langue de neige, rescapée des journées printanières, presque nous attendant, nous mêne jusqu'au village d'Eyne.

Récupérés par le père d'Yvan (à défaut d'être des pros de la Traversée en Continu, on est maintenant très au point dans la logistique du dépot-récupération en voiture) nous irons enfin, chacun de notre côté, pour la (une fois à Pla Guillem, une fois à Soldeu, une fois aux Granges de Noarre, une fois à Vielha, une fois aujourd'hui) 5ème fois dans nos refuges respectifs. En attendant que la dépression passe. Pour poursuivre notre périple dans les Pyrénées aragonaises et Luchonnaise. Là où nous l'avions laissé.

A bientôt

Nico, Micka et Yvan

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