Le Monde des Pyrénées

Les chiens divagants: Un problème méconnu en 2012

On appelle souvent à tort "chien errant" un chien qui n’est plus sous la responsabilité de son maître ; dans la réglementation nationale, il est "en état de divagation".
Un chien errant est un chien retourné à l’état sauvage et n’ayant pas ou plus de maître. En France, il n’y a pour ainsi dire aucun chien errant.

- Informations Générales

Les chiens divagants sont responsables chaque année de prédations non-négligeables sur les troupeaux domestiques, notamment sur les ovins. Les chiffres avancés dans la littérature sont assez variables: selon les études, ils seraient responsables de prédations annuelles à hauteur de 0,18 % à 5 % (!!!) des effectifs présents. Autrement dit, sur un effectif de 10.000 brebis, les chiens divagants prédateraient chaque année de 18 à 500 brebis, selon les études considérées. Ces chiffres doivent être manipulés avec prudence, les zones d’étude n’étant pas forcément très représentatives.
La dernière étude sur le sujet a été réalisée en partenariat par le CERPAM(Centre d’études et de réalisations pastorales alpes méditerranée - service pastoral PACA), le SUAMME (Service d’utilité agricole montagne élevage - service pastoral Languedoc Roussillon) et l’ENITAC (École nationale d’ingénieurs des travaux agricoles de Clermont-Ferrand) ; compte tenu de son ampleur et de la diversité des zones prospectées, c’est vraisemblablement l’étude pouvant être le plus facilement extrapolée. Deux chiffres à retenir:

  • Taux de prédation annuel moyen de 0,25 % (25 brebis prédatées chaque année pour un effectif de 10.000)
  • Nombre d’attaque par troupeau et par an de 0,18.

Ces chiffres permettent de modérer les débats sur les responsabilités respectives du chien et du loup dans les dégâts aux troupeaux domestiques. En 2006 dans les Alpes, 500.000 ovins appartenant à 1.820 éleveurs se trouvaient en zone de présence avérée du loup. Avant l’arrivée du loup, l’ordre de grandeur des prédations annuelles par les chiens divagants pouvait être de 1.250 brebis sur cette zone. Ce nombre est à rapprocher des 2453 ovins indemnisés en 2006 au titre de la prédation du loup.
Ce dernier chiffre concerne toutefois des troupeaux très majoritairement munis de moyens de protection, alors que le niveau de prédation dû aux chiens a été mesuré dans des zones sans loup, où les troupeaux ne mobilisent que très rarement des moyens spécifiques de protection.
Le nombre d’attaques imputées au loup par élevage et par an est de 0,50 pour 2006 ; un éleveur en zone de présence du loup a donc en moyenne une attaque de loup tous les deux ans.
Les attaques de loup seraient donc plus fréquentes que les attaques de chiens divagants alors que les troupeaux concernés sont plus fréquemment protégés ; par contre, le nombre de victimes par attaque est plus faible pour le loup (2,7) que pour le chien (3,8).
Une étude récente publiée en 2009 menée dans le pays basque en Espagne propose une méthode pour différencier les loups et les chiens divagants et leurs régimes alimentaires par analyse des décès.
Une première analyse génétique des fécès permet de différencier l’espèce puis l’analyse des restes contenus dans ces fécès permet d’étudier le régime alimentaire et en particulier la part d’ongulés domestiques. Ainsi, sur les 136 fécès analysés, 31 appartenaient à des loups et 53 à des chiens (plus 2 à des renards).
Parmi les fécès lupins, environ un quart contenaient des restes d’animaux domestiques contre un peu plus de la moitié pour les fécès canins. Proportionnellement, les chiens divagants semblent consommer plus d’animaux domestiques que les loups, ce qui peut s’expliquer par la proximité plus grande des chiens avec les animaux domestiques.
La part d’ongulés domestiques dans les fécès des chiens reste cependant assez élevée, ce qui met en évidence un impact non négligeable sur la faune sauvage.
Outre les résultats chiffrés, l’intérêt de cette étude est d’avoir mis en évidence une technique qui pourrait peut-être permettre d’étudier l’impact des chiens divagants sur les troupeaux domestiques.
Au-delà des différences dans les modalités d’attaque entre chiens et loups, une autre raison est la mise en place de mesures de protection dans les zones colonisées par le loup, lesquelles ont pour effet de diminuer le nombre de victimes par attaque.(1)
Il est probable que la mise en place de chiens de protection sur des zones non colonisées par le loup permettrait de même de limiter l’impact des attaques de chiens divagants, mais le niveau de prédation généralement observé n’incite pas les éleveurs à s’équiper de moyens de protection souvent contraignants.
Ces chiffres ne reflètent pas la différence de perception par les éleveurs des attaques de chiens et de loups.
En simplifiant:

  • Les attaques de chiens ont lieu de jour
  • Le chien est vu pendant l’attaque
  • Il s’agit souvent d’un chien du voisinage.

Le problème peut donc être réglé et il est possible de se prémunir contre ces attaques sans changement des pratiques pastorales.
Quant aux attaques de loup, toujours en simplifiant:

  • Les attaques ont lieu de nuit
  • Le loup n’est pas vu par l’éleveur

Se prémunir contre ces attaques demande souvent une modification de la conduite de l’élevage et un travail supplémentaire important, qui ne suffit pas forcément à régler le problème.

Source 30 juin 2012:
Ministère de l'Ecologie, du Développement Durable, des Transports et du Logement
Ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation, de la Pêche, de la Ruralité et de l'Aménagement du Territoire

(1) Ndr: Avec le recul sur 20 années, en 2012 il ne semble pas que les mesures de protection soient particulièrement efficaces. Les prédations progressent de manière régulière.