Le Monde des Pyrénées

E-pasto: une clôture virtuelle contrôle le bétail à distance

Equipement

Le projet européen Agripir dont l’objectif est l’implantation des nouvelles technologies dans le secteur agropastoral des Pyrénées a lancé la première phase de test de son projet pilote "e-pasto" : grâce à un système de géolocalisation, un berger contrôle les troupeaux à distance, ce qui permet de supprimer les clôtures physiques. Explications.

Verra-t-on bientôt des troupeaux paître en estive de montagne sans clôture? C’est ce qui s’est produit cet été sur les pâturages du Prat d’Albis dans l’Ariège (Midi-Pyrénées): une quinzaine de bovins ont été équipés de colliers permettant au berger d’observer leur position et leur déplacement à distance, grâce à un système de géolocalisation.

Il s’agit de la première phase, baptisée e-pasto, du projet européen Agripi (1) dont le principal objectif est l’implantation des nouvelles technologies dans le secteur agropastoral des Pyrénées. E-pasto vise à libérer les éleveurs de l’installation de clôtures physiques pour parquer les troupeaux, améliorer le suivi des bêtes et faciliter la cohabitation entre tous les usagers de la montagne. Il faut dire que les clôtures coûtent très cher à entretenir et dénaturent le paysage où évoluent aussi les touristes, les randonneurs, des animaux et les chasseurs…

Panneau
Thierry Marfaing, de la fédération pastorale de l'Ariège, Guillaume Terrasson et Alvaro Lharia, enseignants-chercheurs à l'Estia, et Alvaro Llaria, ont participé au lancement du projet e-pasto et à la montée du troupeau "test" en estive le 26 mai dernier. Un panneau placé en haut de l'estive explique le projet.

E-pasto consiste à équiper des animaux d’un collier émetteur-récepteur doté d’un système GPS. «Grâce à ce collier et au moyen d’un ordinateur, d’une tablette tactile voire d’un Smartphone, le berger peut localiser le cheptel», explique Amélie Hacala, chercheur à l’Ecole supérieure des technologies industrielles avancées (Estia) à Bidart, école qui pilote le projet. «A terme, nous espérons pouvoir mettre en place des solutions d’interaction avec l’animal – sons, vibrations, impulsions électriques – permettant, tels des rennes, de diriger le bétail vers la zone souhaitée.» Autre avantage du système: il permet même de se faire une idée sur l’état de santé de la bête. Pourvu d’un accéléromètre, le collier pourrait en effet permettre de mesurer les mouvements des bêtes porteuses et leur situation: «si l’animal se met à courir, c’est sans doute qu’il y a un danger ou qu’il est affolé par un prédateur et s’il ne bouge plus c’est soit qu’il est malade, blessé ou…mort.», précise Amélie Hacala.

Pour ce faire, il a fallu concevoir un collier qui résiste aux intempéries (fortes chaleurs, pluie, gelées, foudre…), mais aussi aux coups, frottements, morsures, et ne gêne pas l’animal. Il devait aussi être doté d’un GPS et d’un système de communication pour émettre et recevoir des données tout en étant réfractaire aux champs électromagnétiques pour éviter les interférences. En plastique et mesurant une dizaine de centimètres, le boîtier est petit, léger, et peut être intégré aux colliers traditionnels. Doté de la technologie Sigfox, une société toulousaine qui fournit le réseau de communication nécessaire à la réalisation du projet, il est peu gourmand en énergie et peut émettre un signal à une distance de 40 kilomètres.

Cette première phase de tests concerne une surface de 2000 hectares, à une altitude de 900 à 1600 mètres. Un terrain qui peut accueillir en période estivale plus de 1000 têtes d’ovins, près de 600 têtes de bovins et 65 chevaux, appartenant à un groupement pastoral de la région.

Une autre phase de test devrait débuter à l’été 2014, du côté du Pays basque espagnol, dans le pays d’Urola-Erdia (Gipuzkoa), une zone plus escarpée et peuplée d’arbres. Ces phases expérimentales doivent permettre d’étudier les réactions des bêtes et de déterminer quelle proportion et quel type d’animal (adulte, jeune, dominant, leader) doit être équipé du dispositif électronique dans chaque troupeau, et quels stimuli sont les plus appropriés. Restera ensuite à faire adopter le collier aux agriculteurs et…aux bêtes!

(1) rassemblant 13 partenaires franco-espagnols publics et privés: Agrimip Sud-Ouest Innovation, Aerospace Valley, Ariège Expansion, Fédération pastorale de l’Ariège, le CESBIO, l’Inrae, l’Estia, le Conseil général des Pyrénées-Atlantiques, Neiker, Tecnalia, Vicomtech-IK4, Loiola Berrikuntza, IRTA.

E-Pasto, un projet de clôture virtuelle et de géolocalisation des troupeaux