- Le contexte politique
A cette époque, Juppé était premier ministre (1995)
Corrine Lepage, Ministre de l'environnement
Jean Dussour, Préfet
Josette Durieu, sénateur (elle l'est toujours) socialiste
Tous les élus locaux du Val Louron sont socialistes
- Les "pour" et les"contre"
A cette époque tout le monde était contre la THT (un peu comme aujourd'hui contre la TCP). Il y avait des
manifestations, des pétitions, des réunions qui n'avaient pour effet que de bader le pèlerin... mais rien de concret.
Certains élus (dont un national assez important) commençaient à recevoir des "dédommagements" et "honoraires" pour services rendu à EDF. C'est ainsi que la station de Nistos-Cap
Nesté aurait été construite avec un chèque de 3 MF d'EDF.
Je passe sur les détails de cette construction dont la presse s'est fait l'écho en son temps: routes sur terrains privés non acquis, construction sur une commune non "dédommagée",
procès, etc...
- Le déclenchement de l'arrêt de la THT
Jean Dussour était un mordu des sports de nature: montagne, cheval, vtt, ski, escalade, parapente... qu'il faisait régulièrement avec CRS, Gendarmes et son conseiller technique,
guide de haute montagne, Modeste Crampe. Il connaissait bien le Val Louron.
Un jour Corinne Lepage vient à Tarbes pour je ne sais plus quelle raison. Sur le tarmac de l'aéroport il lui dit: "pour le Louron, il faut faire quelque chose pour qu'il n'y ait
pas de THT. Il faut en parler à Jupé".
Quelques semaines plus tard, Jupé arrive à Tarbes avec Corinne Lepage et partent dans le Louron. Pas de chance: un brouillard terrible. Mais le Louron ne manque pas de ressource:
visite de quelques églises, de structures d'activités et de vacances. Et Juppé décide: j'en ai assez vu. Préparez quelque chose en vue d'assurer la protection des lieux.
- Le début de la procédure de classement du Haut Louron
A partir de là, tout va vite. Il est décidé une procédure de classement du Haut-Louron compte tenu du caractère sauvage et remarquable de la montagne. La commune de Loudenvielle
prend des dispositions quand aux limites et une délibération. Quelques jours plus tard la commission départementale des sites se réunissait (j'y participais) pour donner un avis
favorable.
Le principe: si le Haut-Louron était classé, c'est à dire toute la frontière entre les Hautes-Pyrénées et l'Espagne, il était juridiquement impossible de faire passer la THT.
- Tout a failli capoter
Le jour de cette réunion historique, Patrice de Bellefon m'attendait dans la cour de la Préfecture et me dit:
- "Dollo c'est d'accord, on vote contre le Haut-Louron, il faut classer tout le bas avec les églises et les villages
- Qui c'est "on"?
- Et bien le CAF, l'association de protection du Louron, etc...
- Je ne suis pas au courant, on verra..."
En fait j'en avais eu vent... et j'avais des billes dans mon sac.
Au cours de la séance où le CAF était absent, de Bellefon présente son contre projet en prétendant qu'on ne pouvait pas classer le Haut-Louron parce que "les montagnes étaient sans
intérêt".
Je demande la parole et là tout s'écroule pour Patrice:
- J'avais l'accord du VP du Syndicat des Guides pour dire qu'il n'avait pas qualité de parler au nom des guides de Haute Montagne et qu'il ne représentait que lui même.
- J'avais la collection des bouquins de de Bellefon et en particulier les "100 plus belles courses des Pyrénées" où il vente le caractère sauvage et remarquable de ces montagnes.
Patrice a plié ses affaires, est parti et ne s'est plus jamais représenté à cette commission.
Le Conseiller Général Pellieu avait fait une intervention brillante et remarquable pour défendre ce classement. Il a d'ailleurs toujours été de tous les combats, avec beaucoup de
conviction contre cette THT. Il est vrai qu'il a toujours une vision touristique très réaliste pour cette vallée et il a su passer à l'action.
L'unanimité était maintenant acquise.
Mais pourquoi donc n'y avions nous pas pensé avant???? Curieux non?
- La Phase ultime
Après l'avis de la commission départementale des sites, restait celui de la commission supérieure des sites où siégeait encore Patrice de Bellefon (il avait le siège laissé vacant
par Gaston Rébuffat après son décès et qui dirigeait la collection des "100 plus belles courses" aux Ed. Denoël).
C'est le Préfet Dussour en personne qui est allé défendre le dossier avec les arguments pour démonter éventuellement de Bellefon.
L'avis positif a facilement été donné.
Juppé a pu signer un arrêté de classement
- EDF Come back
L'EDF coincé sur le Louron a tenté de séduire la vallée des Gaves et Gavarnie. Quelques jours après tout ceci, la sous-préfète d'Argelès est sollicitée pour aller à Gavarnie a une
réunion entre EDF et le maire.
Gros coup de colère du Préfet Dussour (j'en étais le témoin oculaire): ici l'Etat c'est moi, et l'Etat dit non a une THT dans les Hautes Pyrénées donc EDF ira voir ailleurs et
l'Etat n'ira pas à cette réunion qui de toute manière ne se fera pas.
L'épisode THT dans les Hautes-Pyrénées était terminé.
- Conclusion
Quand un Préfet a une certaine volonté d'aboutir, un esprit d'ouverture et de concertation et une bonne dose d'intelligence, les bonnes décisions sont prises!
"Là où il y a une volonté, il y a un chemin"
Mais ils sont rares les Dussour, son successeur fut bien autre chose.
Louis Dollobr> 22/02/2004
Nota: chacun a son niveau de lutte a vécu l'abandon de la THT à sa manière. A chaque niveau, une histoire. L'histoire des autres nous intéresse aussi.
- La THT, c'est pas fini!
Le projet de ligne à Très Haute Tension (THT) n'est pas abandonné. La France paie chaque année des dédomagement à l'Espagne pour non respect de ses engagements de fourniture. Après avoir imaginé un passage par Luchon, puis par l'Ariège et le Val d'Aran ou l'Alt Anéou, le projet se polarise actuellement sur les Pyrénées-Orientales où les actions d'hostilités sont importantes.
- Les opposants à une ligne THT interpellent le président de Catalogne
Prades, 25 août 2004 (AFP)
Une délégation de 70 personnes opposées aux projets de construction d'une ligne électrique à très haute tension (THT) entre la France et l'Espagne ont interpellé mercredi à Prades
(Pyrénées-orientales) le président socialiste de la Generalitat de Catalogne Pascual Maragall, a constaté un journaliste de l'AFP.
M. Maragall, qui rendait visite à l'université catalane d'été organisée par diverses associations catalanes, a déclaré à la délégation et à la presse qu'il avait "besoin
d'électricité pour alimenter la Catalogne", mais qu'il était "opposé à un passage aérien et favorable à une ligne enterrée".
"Même enterrée, une ligne de 400.000 volts dénaturerait le paysage car il faudrait réserver une emprise pour sa maintenance et en outre les effets de la THT sur la santé sont très
controversés", a déclaré à l'AFP une de ses responsables, la maire de Saint-Laurent de Cerdans, Isabelle Quintane. "La discussion n'en est qu'à son début. Le projet a été refusé au
Pays basque, dans les Hautes-Pyrénées, nous espérons convaincre M. Maragall qui a été élu dans le cadre d'un pacte avec les Verts notamment, de nous soutenir", a ajouté Mme Quintane.
Le collectif français anti-THT compte sur l'appui des élus locaux de Catalogne dont plusieurs se sont déjà prononcés contre la THT, selon Mme Quintane.