- Gazette de la chasse: point de vue de René Lacaze sur la réintroduction de l'ours
Sous le titre "5 femelles slovènes au printemps ou à l'été 2006", voici ce que les abonnés de la Gazette de la Chasse pourront lire vendredi prochain:
"Comme nous l'avons déjà écrit, c'en est définitivement terminé de l'ours des Pyrénées avec les introductions annoncées par Nelly Olin, ministre de l'écologie et du Développement
durable, de cinq femelles slovènes lors du rassemblement des pro-ours à Arbas (31), le week-end dernier.
Il y aura bien plus d'ours dans les Pyrénées, mais l'ours véritablement "des Pyrénées" est mort, bien avant la mort de Cannelle, puisque c'est en fait de lui depuis les
introductions de Melba, Ziva et Piros, depuis que la population ursine slovène remplace inéluctablement celle des derniers vestiges d'Ursus arctos pyrenaicus.
La piste espagnole n'a donc pas été adoptée et nous nous demandons même si elle a jamais été envisagée... C'est bien dommage, c'est même regrettable puisque, avec des ours
espagnols, nous aurions eu la garantie d'avoir des animaux génétiquement identiques à ceux qui ont toujours peuplé le massif pyrénéen.
Ces cinq femelles "surdensitaires" slovènes, devraient être lâchées en une seule fois, alors qu'à l'origine la M.E.D.D. avait laissé entendre que deux animaux pourraient être
lâchés au printemps et les trois autres dans le courant de l'été 2006.
Mais cet échéancier n'avait pas été du goût des partisans des réintroductions d'ours slovènes (à se demander s'ils n'auraient pas accepté de ours noirs, des grizzlis ou des
"Kodiak" dans leur désir effréné de "lâcher de l'ours"!) qui avaient hurlé au scandale et à la timidité de la ministre.
Pour l'instant, les lieux précis où seront lâchées ces femelles d'"importation" n'ont pas été définis. On parle ainsi de "concertation" préalable avec les élus locaux.
Mais la concertation semble déjà plombée puisqu'on sait que trois de ces ourses pourraient être lâchées dans la Haute-Garonne, alors que deux de leurs congénères le seraient dans
le Béarn.
Dans ce cas, le "partenaire" sera bien entendu l'Institut Patrimonial du Haut Béarn, que préside Jean Lassalle.
Les discussions s'annoncent ainsi très âpres même si, à l'origine, après la mort accidentelle de Cannelle, le député des Pyrénées-Atlantiques s'était déclaré favorable à
l'introduction de deux ourses, avant de faire volte-face, en raison semble-t-il d'un flagrant manque de concertation qui avait conduit le ministre d'alors, Serge Lepeltier,
à mettre les Béarnais devant le fait accompli.
L'I.P.H.B. devra ainsi se prononcer sur ce projet de lâcher avant le 15 décembre prochain.
A Arbas, l'on a donc assisté à une grand' messe (plutôt moyenne d'ailleurs en matière de participation puisqu'on ne dénombrait que "quelques centaines de participants", selon les
sources).
La ministre y a rencontré les élus favorables aux réintroductions.
Mais des ambassadeurs des anti-ours, en l'occurrence des éleveurs ariégeois, n'avaient pas hésité a venir mettre leur grain de sel dans ces "festivités" et à y proclamer que, très
partisans des ours slovènes, ils préféraient les voir poursuivre leur vie en Slovénie...
Suite à l'écoute qu'elle leur a accordée, la ministre a souligné que le projet de renforcement de la population ursine pyrénéenne serait "respectueux des opinions qu'ont exprimées
les uns et les autres".
Elle a annoncé par ailleurs que des pourparlers auraient lieu avec l'Association nationale des élus de montagne (A.N.E.M.) et qu'un plan d'aide à l'activité pastorale viendrait
compléter le dispositif du renforcement du noyau ursin pyrénéen, plan mis en oeuvre par le ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation, de la Pêche et des Affaires rurales
(M.A.A.P.A.R.) et son actuel locataire, Dominique Bussereau.
Comme pour faire passer la pilule parmi les anti-ours, la M.E.D.D. a déclaré qu'elle était contre des "réintroductions massives", en évoquant qu'elles conduiraient à l'échec. Pas
question non plus de prévoir des introductions supplémentaires "avant un long moment".
Mme Olin a expliqué qu'elle ne voulait pas "laisser s'éteindre la race"... Pourtant, c'est bien ce qu'elle favorise selon nous.
Sans entrer dans une diatribe sémantique, il est évident que les lâchers d'ours slovènes ont quasiment fait disparaître la "race" pyrénenne, mais ont renforcé "l'espèce ours" dans
le massif pyrénéen. Le distinguo est important, essentiel même.
Parler aujourd'hui de "race" est une impropriété... La M.E.D.D. devrait en prendre conscience.
A l'heure où vous lisez ces lignes, Mme Olin devrait se trouver en Slovénie afin de régler les derniers préparatifs préliminaires à l'arrivée des ourses et de négocier leur cession
par les autorités slovènes.
La feuilleton "ours" n'est donc pas près de connaître son épilogue, ses derniers rebondissement dans le massif pyrénéen. Il va aussi alimenter les conversations, les débats et les
gazettes!"
Observation de la rédaction de Lourdes-Info:
Cet article sera publié dans le n° 1957 du 30 septembre 2005 de la Gazette officielle de la Chasse et de la Nature. Déjà, dans plusieurs numéros antérieurs de la G.O.C., René
Lacaze avait avancé l'idée de négocier avec les Espagnols le prêt de deux femelles gravides, capturées dans les Cantabriques et relâchées dans le massif pyrénéen pour y mettre
bas et y élever leurs petits jusqu'à l'âge de leur émancipation, femelles ensuite reprises et relâchées dans leur biotope des Asturies pour ne pas amoindrir le noyau ibérique.
D'ailleurs, lors des lâchers de Ziva et Melba, les deux premières ourses slovènes remises en liberté dans la Haute-Garonne, on avait choisi de la même façon des femelles pleines.
Choisir la piste espagnole aurait permis de maintenir la pureté génétique des ours des Pyrénées puisque les ours espagnols sont de la même souche génétique que le noyau-relique
pyrénéen, c'est à dire font partie de la sous-population "Ursus arctos pirenaicus".
Enfin, les Espagnols nous devaient bien cela, selon lui, pour se faire pardonner la pollution des plages atlantiques du Golfe de Gascogne par les déchets échappés de l'immense
décharge littorale de La Corogne, un problème jamais réglé entre les deux pays.
Gérard Merriot
Journaliste