Le Monde des Pyrénées

Coup de gueule: Une solidarité montagnarde particulière

La saison estivale 2003 vient de débuter en montagne et déjà un gros coup de gueule d'un pratiquant de la montagne qu'on ne peut pas qualifier de débutant, qui a eu ses heures de gloire et qui marche encore mais, à 65 ans, sans doute plus comme à 20 ans.

Sans citer de noms pour éviter tout conflit tout en témoignant d'un comportement inacceptable
Je vous laisse apprécier avant de donner mon avis personnel en fin de page.

Je m'étais inscrit pour aller au Népal avec un groupe du XXX d'Annemasse (2) pour faire le tour des Annapurna et au passage un des Chulu (Est et Ouest). Sommets qu'on m'a décrit comme faciles (équivalent du Turon de Néouvielle, le 3.000 le plus facile des Pyrénées m'a dit un copain de la FFME, effectivement de la rando hors sentier).

Bien sûr, avant de m'inscrire, j'avais prévenu: je marche très longtemps, mais à un rythme très modéré et l'organisatrice (connue par Internet) m'avait dit qu'on prendrait tout son temps et qu'il n'y aurait pas de problème.

On avait prévu une petite course pour faire connaissance les 21 et 22 juin: la traversée des Dômes de Miage. Alors, au départ du parking des Contamines, je les ai vus (ils étaient trois) partir sur les chapeaux de roue vers Tré-la-Tête, au point que j'ai pris le mauvais chemin à 5 min du départ (il y a deux itinéraires pour Tré-la-Tête). L'un d'eux est redescendu me remettre dans le chemin, et les 3 autres sont repartis en me laissant sur place.

Arrivés à Tré-la-Tête, ils m'ont attendu 20 minutes et sont repartis aussitôt, pensant que j'éclusais deux diabolos-menthe pour me réhydrater. Ensuite je ne les ai pas revus avant d'arriver aux Conscrits, avec quelques hésitations car je ne connaissais pas le nouveau chemin par les vires et les câbles...

Le lendemain, départ à toute vitesse pour aller au col des Miages ou, comme prévisible, mon poids excessif de 90kg faisait effondrer la neige sur la crête. Quand je suis arrivé au refuge des Conscrits, tout le monde était parti... et je ne connaissais pas le chemin de descente. Par erreur, je suis passé par le glacier qui ne m'a pas posé de problèmes avec la glace vive et mes crampons.

Je n'ai eu de leurs nouvelles que le lendemain... par téléphone à mon retour à...... (en région parisienne).

Mais je n'étais pas le seul à avoir eu un problème: un autre participant, le cinquième du groupe, un Belge, était arrivé encore plus tard aux Contamines puis à Tré-la-Tête et s'était trompé de chemin au-dessus. Il avait dû appeler les pompiers au portable et ceux-ci l'ont remis sur le chemin de Tré-la-Tête, d'où il est redescendu par prudence.

Mes ex-futurs collègues ont discuté au refuge des conscrits avec un guide des Houches qui leur a recommandé le caisson hyperbare pour faire un simple 6.100. Ce qui a inquiété l'organisatrice, d'autant plus que lui-même et moi avions avertis l'organisatrice potentielle des exigences de l'acclimatation.

Je l'ai rencontré en redescendant au refuge, et il a été scandalisé qu'on m'ait laissé finir la traversée en solo, les autres étant pressés de redescendre. Honnêtement, je lui ai dit que, hormis une unique petite rimaye, j'étais largement capable de traverser les Miages en solo, ce que j'ai fait pour ne pas gêner mon compagnon de cordée (de 68 ans) quand je tombais dans un trou.

Ceci pour l'histoire. Mais la fin est plus croustillante: j'ai dit à l'organisatrice que je croyais que le rythme serait modéré.
Réponse: "oui, mais dans le groupe il y avait une jeune femme très entraînée, skieuse de randonnée, qui avait demandé qu'on aille vite, à son rythme".

J'ai alors demandé: "mais quand, dans un groupe, il y a des gens plus lents, on ne les attend pas aux points stratégiques?" Réponse: "jamais au XXX d'Annemasse."

Conclusions:
a) la solidarité dans un groupe est une notion obsolète, même dans un club réputé conservateur comme un XXX.
b) l'important n'est pas la sécurité, mais la vitesse. Alors quand, dans la lettre n°9 (1), on parle des ministères qui privilégient la compétition, c'est également vrai dans beaucoup de clubs: pour la performance, on fait de la marche rapide, et les autres, on les abandonne au risque qu'ils se perdent. Et ceci, pas de la part du participant lambda d'un groupe, mais de la part de l'organisateur/trice.

Finalement, la candidate organisatrice a annulé le projet de trek/expé car le "groupe était de niveau trop inhomogène" (sous-entendu en vitesse, pas en techniques de sécurité) et elle ne voulait "pas être rendue responsable s'il arrivait un pépin à quelqu'un qu'elle aurait laissé derrière en fonçant à la vitesse des plus rapides". Jamais il ne lui est venu à l'idée que l'organisateur/trice devait attendre ou faire attendre les retardataires aux points délicats... Et il y en avait, non pas dans la traversée de Miages, mais dans la montée et la descente Conscrits - Tré-la-Tête, la preuve étant que deux sur cinq avaient pris le mauvais chemin.

Après tout, imagineriez-vous que Richard Virenque ou Lance Armstrong s'arrêtent au milieu d'une étape pour attendre les derniers du peloton?

Mais aussi: un groupe peut-il se permettre de louper la dernière benne ou le dernier train du Montenvers à cause de retardataires? Au moins la question est sans objet dans le parc des écrins, sauf au téléférique de La Grave...

  1. Il s'agit de l'organe de communication interne du club Retour
  2. Les noms sont volontairement masqués. Les intéressés, destinataires de cette page, se reconnaîtront. Retourà

- Observations

1/ Quels que soient les motifs, de la part d'un responsable de sortie, ne pas attendre un camarade et refuser de se "calquer" sur le plus faible ne me semble pas être un principe qui soit dans les référentiels de formation de ce club ou de la FFME. Sa responsabilité est totale.à

2/ Ce comportement n'est pas à généraliser à tous les clubs et à tous les cadres. Nous pouvons dire qu'il y a les bons et les mauvais.

3/ Si l'organisatrice subit la pression des plus forts, c'est que, visiblement, elle n'est pas à la hauteur pour encadrer une sortie. La compétence d'un cadre ne se limite pas à des compétences techniques mais doit également faire appel à des qualités humaines et des compétences en matière de "direction" d'un groupe.

4/ Le Président du club concerné peut s'inquiéter s'il accepte que cette personne continue à encadrer pour son club. Ce n'est pas parce que tout le monde est techniquement capable de faire la traversée des Dômes de Miage que l'on doive obligatoirement le faire en solo "groupé" dans le cadre d'une sortie de club.

5/ Prévoir un caisson hyper-barre pour les Chulu et le Tour des Anapurna est toujours possible. Mais pourquoi pas emmener l'hôpital pour plus de garanties. Je crois que monter lentement participe également au fait de ne pas emmener tout ce matériel. Il suffit de savoir s'adapter à la nature au lieu de toujours vouloir la dompter.

Ma vision est peut être celle d'un vieux C... mais je crois très sincèrement que c'est un groupe et une organisatrice à éviter pour longtemps.

A voir également: Comportement en montagne et escalade