18 mars 2014: Belvédère, Mercantour. La grève de la faim se poursuit

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La journée du 18 mars 2014 aura sans doute été décisive pour Catherine Bisotto mais insuffisante compte tenu de l’absence de confiance à l’égard du maire de Belvédère, Paul Burro, et son adjoint. Elle a de bons motifs à se méfier des manœuvres. Surtout lorsque le Parc National du Mercantour s’en mêle à peine discrètement. Heureusement, la Chambre d’Agriculture ne s’en est pas laissé compter. Ils ont vite vu la manipulation qui allait conduire à la disparition d’un éleveur embarrassant pour… l’écologie profonde.

- Une nuit sans histoire…

Catherine a passé sa première nuit sous la tente devant la mairie de Belvédère. "Excellente nuit" nous dit-elle au petit matin alors que son entourage de passage devant la tente se prépare à partir pour une réunion à la Chambre d’Agriculture…. Pour Cathy ce sera sans café ni croissant. Juste de l’eau.

- Table ronde à la Chambre d’Agriculture

C’est au cours de cette réunion que tout (ou presque) se dévoile. Ou, du moins, toutes les cartes sont mises sur la table. Et comme nous l’avions suggéré ce matin le problème dépasse largement les propos réducteurs tenu par le maire à Nice Matin. Il ne s’agit pas "simplement de réajustement des tarifs pour la location de ces terres" mais bien d’une cabale contre Catherine. Etait présente, la jeune agricultrice, Amandine, qui veut s’installer en tourisme équestre à la demande du maire de Belvédère. C’est pour elle qu’il a décidé de réduire les surfaces exploitables de Cathy. Mais c’était sans compter qu’elle refuse de s’installer dans l’ambiguïté du conflit en conservant de bons rapports avec les autres éleveurs. Du coup, elle se retire, apporte son soutien à Cathy et recherche une solution d’installation avec la Chambre d’Agriculture.

Le maire de Belvédère fait-il le bon choix?

- Et le Parc National du Mercantour

Si officiellement le Parc National du Mercantour n’est pas impliqué, le chef de secteur y est totalement impliqué. Il va jusqu’à présenter des exigences d’aménagements de clôture aussi stupéfiantes qu’irréalisables. "A chacun son métier" nous dit-on. "Quelle compétence d’élevage à ce type?" Nous pouvons nous interroger sur son rôle et ses objectifs.

En 2012, à l’occasion des 30 ans du Parc, Eric Cioti, Président du Conseil d’Administration titrait son éditorial : "30 ans au service de la nature et de l’homme, et un avenir à partager". Et il poursuivait: "Depuis 1979, cet établissement public et ses agents accomplissent un travail remarquable de protection, de sensibilisation, d’accueil et de développement local. Trente années qui ont abouti à l’obtention d’un équilibre entre la nécessaire protection de la nature et l’importance de conserver, dans les vallées et villages de ce territoire, une vitalité humaine forte. En tant que Président du Parc national du Mercantour, je souhaite maintenir cet équilibre".

Le 12 décembre 2012, lors d’un point presse avec le club de la presse des Alpes-Maritimes, il était présenté le "Concept Parc National" avec ce sous-titre: "Vocation des parcs nationaux français: préservation de la biodiversité et des activités qui y sont liées"

Si nous ne remettons pas en cause la sincérité d’Eric Cioti, nous pouvons nous interroger sur la réalité de la place de l’homme et de ses activités traditionnelles que sont l’élevage et le pastoralisme, dans le Parc National du Mercantour. La multiplication des conflits en 2012, le rapport de la Mission d'appui au parc national du Mercantour établi par Emmanuel Rébeillé-Borgella et Eric Verlhac, Inspecteurs généraux de l'administration du développement durable en décembre 2012, l’ affaire Didier Trigance, etc…. nous faisaient nous interroger: "Le Parc National du Mercantour veut-il vider ses montagnes de tous ses bergers pour laisser la place au loup?"

En 2014, le comportement de certains agents, responsables de secteur, n’a guère évolué. Cette affaire des estives de Belvédère en est le révélateur. Et nous ne parlerons pas ici du projet UNESCO.

- Quel avenir pour Catherine?

Elle nous parle… "En direct: je suis toujours devant la mairie de belvédère, toujours en grève de la faim". Et puis: "Voici les news: l'appel d'offre a été suspendu par le maire, qui prévoit une réunion avec les instances administratives (mais sans les éleveurs impliqués) réunion pour le 26 mars. Je ne cesserais que lorsque je serai assurée de pouvoir continuer mon activité puisqu'une JA a bien soumissionné pour prendre mon pâturage d'été".

Nous avons appris que la JA allait retirer sa soumission. Imaginer que la décision sera purement administrative à une date fixée autoritairement par un futur élu, c’est manifestement ne pas avoir compris que nous vivons au 21ème siècle dans une société qui se veut participative.

Quant au Parc National il devra savoir rester à sa place et s’appliquer à lui-même ce qu’il exige des autres. Parions que la décision devra être prise avant samedi car derrière il y a une femme, une famille qui veut vivre. Le maire de Belvédère veut-il sa mort?

Louis Dollo, le 18 mars 2014

- Le maire de Belvédère fait-il le bon choix?

Le maire de Belvédère, Paul Burro, mise tout sur le tourisme. "C’est l’avenir" dit-il. Pourquoi pas? Mais le touriste ne vient que si le milieu, les paysages sont attirants. Et qui font les paysages de montagne ? La montagne telle que nous la connaissons est le résultat de l’action des bergers et leurs bêtes depuis des millénaires. Ce sont eux qui ont fait les chemins, maintenu des espaces ouverts permettant d’admirer la montagne. Dans la vidéo de présentation de la commune, le "troubadour" explique que par le passé il y avait beaucoup moins d’arbres. La commune comptait vers 1890, pas moins de 450 bovins, 622 moutons, 57 chèvres et 400 porcs. L’été il fallait rajouter les transhumants avec 350 bovins, 6400 moutons et 1800 chèvres. L’action conjuguée de toutes ces bêtes entretenait le milieu qui, aujourd’hui se ferme avec ses paysages.

Le maire veut développer le tourisme. Il a raison. Mais en montagne le tourisme de qualité sur des petites unités dans des lieux qui n’ont rien d’emblématique, se conjugue avec l’élevage, jardinier du milieu et de la biodiversité mais aussi producteur de produits de qualité pouvant être consommé sur place comme le miel.

Peut-être qu’au lieu d’opposer les différents acteurs du territoire le maire, Paul Burro, devrait organiser ou au moins favoriser la complémentarité des acteurs du territoire qui, selon leurs compétences, peuvent avoir un rôle positif au profit de la collectivité. Bien entretenu, et en dehors des parkings d’accueil des touristes, la commune a des atouts pour développer l’élevage sans se marcher sur les pieds et permettant de ré ouvrir des espaces pour "respecter le patrimoine que les anciens ont laissé". Ce serait sans doute plus positif et efficace pour l'avenir que d’appliquer la politique, peut être sans le savoir, de l’extrémisme écologique qui ne conduit qu’à l’exclusion de l’humain et ses activités de tous les espaces. Car le "rewilding" est bien l’objectif, depuis longtemps, du Parc National du Mercantour qui ne cesse de tromper ses interlocuteurs par des discours "d’enfumage".

Louis Dollo, le 18 mars 2014