Pour un pyrénéen, le pastoralisme dans une vallée et sur un sommet breton peut paraître incongru. Pourtant ça existe comme l'indique le témoignage ci-dessous.
Mais ce pastoralisme là ne connaît pas les contraintes de la montagne pyrénéenne: durée et rigueur de l'hiver, terrains pentus, ours, et bénéficie d'avantages tel que possibilité
de mettre des clôtures où les brebis pourront pacager toute l'année. Pas besoin de bergers et de cabane pour protéger le troupeau et même s'il y a un Patou, il sera facile d'aller
l'alimenter tous les jours tout en visitant le troupeau tous les matins en voiture ou à moto.
Moyens différents... coût différent. A suivre!
Berger depuis 20 ans, Thierry Machard est arrivé dans la vallée du Rivoal par accident. "Jusqu'en 2000, j'étais berger d'un troupeau de 2.500 brebis dans le Puy de Dôme". Ce sont
les circonstances et les rencontres qui l'ont guidé, lui et sa compagne Thérèse, d'origine bretonne, vers l'Ouest. "Après une escale à Tours, j'ai été recruté comme berger et
formateur au lycée du Nivot à Lopérec en janvier 2003. J'étais responsable du troupeau allaitant bovin et ovin et assurais dans le même temps un volet pédagogique pour plusieurs
niveaux du lycée."
Le lycée souhaitant recentrer ses activités et abandonner la production ovine, Thierry a rapidement sauté sur l'occasion: "Je trouvais dommage d'arrêter cette production, j'ai donc
proposé de m'installer avec une reprise du cheptel et la location des terres et de la bergerie."
Ayant 40 ans en 2005, Thierry a dû boucler son projet d'installation en six mois. "Dès le projet accepté par le Nivot en juin 2004, j'ai arrêté toute activité pour me consacrer
entièrement à mon projet jusqu'à mon installation en janvier 2005. Thérèse a géré l'élevage pendant cette période de transition. Je conseille à tous les futurs installés de se
concentrer sur leur projet et de ne faire que cela. C'est important pour faire les bons choix, vérifier la viabilité du projet et choisir les bons partenaires. Sur ce plan, compte
tenu de l'originalité de mon installation et du peu de références existantes, j'ai choisi des personnes qui ont su m'écouter, s'intéresser et comprendre l'orientation que je
souhaitais donner à l'élevage."
Michel Le Hir de Cogedis a conseillé le jeune agriculteur: "Après avoir réalisé l'Etude prévisionnelle d'installation qui prenait en compte la spécificité du projet, j'ai conseillé
Thierry sur le financement et nous avons comparé plusieurs trajectoires pour faire les bons choix et optimiser les volets fiscaux et sociaux. Ensuite, nous avons choisi la structure
juridique de l'exploitation qui est en individuelle pour l'instant mais qui pourra évoluer avec l'arrivée de Thérèse."
Aujourd'hui, Thierry a fait passer le troupeau de 250 à 420 brebis avec 60 ha d'herbe et 136 de landes sur le site magnifique de la montagne St Michel. "J'ai changé la conduite de
l'élevage avec un système 100 % herbager. Je suis contraint d'acheter des céréales pour les mois d'hiver, mais je n'ai fait aucun investissement matériel car je privilégie le
travail en cuma et l'entraide avec des voisins. J'ai également signé un Contrat d'agriculture durable qui m'a permis de conforter mon projet. Ce contrat prévoit notamment le
non-usage des engrais minéraux et l'entretien de 136 ha de landes sur la montagne St Michel de mai à septembre."
La présence des brebis dans le pays de Brasparts renoue avec une tradition d'élevage oubliée depuis le début du XXe siècle. "Mon projet a reçu le soutien de tous les propriétaires
des terres de la montagne, à commencer par le Parc naturel régional d'Armorique, le Conseil général et la Fédération des chasseurs. L'objectif est de limiter l'impact sur
l'environnement tout en entretenant un territoire laissé à l'abandon."
Côté valorisation, l'éleveur a fait le choix de vendre sa production au plan local. "Mes bêtes sont abattues au Faou et sont vendues auprès d'artisans quimpérois et d'une grande
surface de Crozon. En privilégiant les circuits courts, je valorise mieux ma production. J'ai engagé des partenariats avec d'autres éleveurs pour être en mesure d'assurer une
production toute l'année et j'optimise ma conduite d'élevage également dans ce but."
A peine installé, Thierry a déjà un autre projet en tête. "Thérèse va me rejoindre sur l'exploitation en 2006 pour développer la valorisation de la laine. Aujourd'hui, les animaux
sont tondus surtout pour raisons sanitaires, mais la vente de la laine paie à peine le tondeur. Notre idée, en association avec un autre couple d'éleveurs, c'est de transformer la
laine nous-mêmes après l'avoir fait laver par un Centre agréé en Creuse."
Guy Lemercier
COGEDIS
Source: Paysan Breton