Deux ours ont été tués ce printemps en Haute-Ariège
Communiqué de l'ASPAP du 3 septembre 2009
Errante, toujours vivante malgré ses blessures mais condamnée, "la noire" une des plus belles du troupeau, devra être abattue à l'arme à feu.
La DIREN* se gausse de la baisse des prédations en 2009 ... d'ordre arithmétique: l'Ariège compte deux ours de moins depuis le printemps.
L'Ariège est encore au premier rang des attaques d'ours sur tout le massif pyrénéen en 2009. Mais la carte des dommages d'ours, en baisse par rapport à 2008 une centaine au 30/8- révèle un surprenant retournement de situation: c'est désormais le Couserans, à l'ouest du département qui subit 2/3 des attaques, le reste survenant en Haute-Ariège. Jamais le mois d'août n'y avait été si calme: aucune attaque en un mois! Les ours y seraient-t-ils devenus végétariens?
Evidemment non. Deux ours ont été abattus ce printemps en Haute-Ariège. C'est ce que Philippe Lacube a révélé ce jeudi soir à France 3: "certains ont fait le ménage ici. Je ne veux pas savoir qui. On en a assez d'entendre la Diren raconter que si les attaques baissent, c'est grâce à la protection des troupeaux. S'il y a moins d'attaques, c'est parce qu'il y a moins d'ours. La préfecture peut bien démentir, ils ne savent strictement rien de ce qui se passe dans ces montagnes."
Les éleveurs du Couserans, où se concentre la quasi totalité des ours slovènes lâchés et de leur descendance, subissent des attaques incessantes dans leurs estives, où les troupeaux passent l'été. Les gardes de l'ONCFS sont appelés quasiment tous les jours pour établir les constats de dommages: le 30/08 à Seix, sur l'estive de Berbégué; les 28 et 29/08 à Seix, sur l'estive du groupement pastoral de Fonta; le 28/08 à Saint Lary où 6 brebis ont été attaquées simultanément! Le 26/08 à Fonta encore où une brebis a succombé sous 15 impacts différents de crocs d'ours. Les 22 et 23/08 à Couflens, sur l'estive d'Areou. le 20/08 à Couflens: Jérémy Amilhat, jeune éleveur, n'en revient pas. "Mon estive n'avait connu qu'une seule attaque depuis 1958!" Certains gardes ont confié leur inquiétude devant la violence de certaines attaques, "qui pourraient être le fait de plusieurs ours".
Décriées dès leur préconisation, concomitante aux premiers lâchers de 1996, les mesures de protection censées préserver des attaques le sont d'autant plus cet été, y compris par
leurs utilisateurs: la multiplication des situations où elles se sont montrées inopérantes explique-t-elle pourquoi leur nombre stagne depuis plusieurs années?
- Début juillet, Sentein, vallée du Biros: Michel Estrémé assiste son ami Thierry, dont 3 brebis viennent d'être tuées par Hvala. Ils passeront la nuit sur place. Cela n'empêchera
pas l'ourse, suitée de deux oursons, de rattaquer la nuit même, malgré la présence de 4 bergers itinérants de l'ETO (Equipe technique ours).
- Mi-août, Melles, Haute-Garonne, limitrophe des estives de St Lary: sur cette "estive modèle" du plan-ours, gardiennage permanent, clôtures, parcs, chiens patous ... l'ours
a tué 6 brebis.
Sur 90 prédations, 80 ont eu lieu dans des estives gardées jour et nuit.
Les émetteurs GPS des ours lâchés en 2006, qui envoyaient un SMS de localisation toutes les 3 heures, ont tous cessé de fonctionner: une situation normale selon le ministère de l'Ecologie, il n'est d'ailleurs pas prévu d'équiper d'émetteurs la descendance des ours lâchés. Le silence se fait dans les Pyrénées, et sur le répondeur de l'Equipe Technique Ours, totalement dépassé: dernière localisation de Sarousse ... le 16 mai 2009 à Bagnères de Luchon. Balou est réapparu le 26 août à Comus, limitrophe de l'Ariège à l'est, où sa trace avait été perdue le 19 juin. Enfin Hvala, absente du répondeur officiel depuis le 5 août à Les, au Val d'Aran, refait surface le 26 août à Melles (31). Comment savoir quelles attaques lui sont imputables? Les autres ours ne peuvent être localisés que s'ils laissent des traces (empreintes, poils, crottes). Du coup le serveur indépendant et solidaire de l'Aspap tourne à plein: plusieurs dizaines d'appels par jour au 05 61 01 13 80.
Pour qui a assisté à une expertise, le mode opératoire particulier de l'ours - thorax écartelé, côtes et entrailles de la brebis rongées - soulève le coeur, voire l'indignation. Mais la dernière attaque sur l'estive du Barestet semble avoir dépassé les limites du soutenable. Gérard Dubuc, présent en tant que maire de Saint Lary - et co-président Couserannais de l'Aspap - témoigne: "je n'aurais jamais pu imaginer ça: 6 brebis, plus deux autres retrouvées plus tard, mortes ou blessées; Surtout cette belle noire, aux yeux bleus et doux: son poitrail arraché, ensanglantée, elle vivait encore ... avec de telles blessures, elle était condamnée, il fallait l'euthanasier nous-mêmes, en l'égorgeant! Qui a le droit de nous demander ça? Finalement il a fallu l'achever à l'arme à feu, un pistolet revolver, celui du garde de l'ONCFS .... Qui nous parle de confort animal? Sommes-nous condamnés à subir de pareils spectacles longtemps encore? Qui en sont les responsables? On n'est pas disposés à tout entendre venant du délire des promoteurs du "sauvage", et notamment sur la responsabilité de ceux dont ces bêtes sont à la fois l'outil de travail et une propriété affective."
Un ras le bol largement partagé sur le terrain, où l'entraide s'organise autour des éleveurs touchés: chaque expertise se déroule désormais en présence d'une "équipe de soutien". Cette solidarité - pression? - montagnarde des Ariégeois, notamment en Couserans, ainsi que la chute inexpliquée des présences et des attaques d'ours en Haute-Ariège - qui cristallisait 13 ans de colère -, ne serait pas du goût du nouveau préfet de l'Ariège ... Quand aux élus, ils ont martelé leur soutien aux éleveurs lors des Pastoralies 2009 organisées à Guzet. Malgré la pluie, "la fête de la montagne vivante" avait attiré près de 6.000 personnes.
Augustin Bonrepaux, président du Conseil Général y avait exhorté l'Etat à cesser les introductions: "le miracle promis avec la réintroduction de l'ours n'a pas eu lieu. Aujourd'hui les montagnards sont rassemblés... il aura fallu treize ans pour se rendre compte que ce que l'on nous a promis n'est pas arrivé .../... On s'est opposé au parc national pour éviter que l'Etat dirige notre montagne et pour continuer à conserver les droits d'usage (bois, pâturage, randonnée...). Nous prenons ici l'engagement de rester unis pour entretenir la montagne et la faire vivre"
Au moment où Chantal Jouanno doit se prononcer sur la suite à donner au plan-ours 2006-2009, l'actualité ariégeoise pourrait faire désordre.
Source: étude des constats de dommages d'ours en vue d'indemnisation au 30/08/2009 + attaques ne faisant pas l'objet d'une demande d'indemnisation. Le choix de faire ou non cette demande auprès de l'Etat appartient à chacun, éleveur ou apiculteur.
* diren: direction régionale de l'environnement
* ONCFS Office national de la chasse et de la faune sauvage
Source: ASPAP du 3 septembre 2009