Franck Diény est éleveur de moutons à Ventavon dans les Hauites-Alpes. Il produit de l'agneau de Sisteron. Il est concerné par les attaques de loups. Il en parle à Radio DICI en juillet 2012 et se confie à nouveau à l'AFP en mars 2013. Il parle de ce qu'il vit, de ce qu'il connait contraorement aux associations environnementalistes qui parlent de ce qu'elles ne connaissent pas à la place de ceux qui connaissent.
Frank Dieny élève des brebis dans les Hautes-Alpes. Economiquement, il ne peut pas se plaindre, l'agneau de Sisteron se vend bien. Mais psychologiquement, il a traversé des mauvaises passes à cause des loups.
Il est à la tête d'un cheptel de 700 brebis, qui lui fournissent chacune presque un agneau par an. Et "ça marche bien", explique-t-il dans les allées du Salon de l'agriculture.
D'abord parce que l'agneau de Sisteron --agneau jeune au goût fin et onctueux-- est couru dans les boucheries. Mais aussi parce que le secteur ovin bénéficie d'aides spécifiques de l'Union européenne.
"Dans les années 80, les éleveurs français fournissaient 80% de la demande. Aujourd'hui, on n'assure que 40% du marché, le reste provenant de Nouvelle-Zélande, Angleterre ou Irlande", explique-t-il.
L'éleveur bénéficie en outre d'aides spécifiques à l'agriculture de montagne, pour l'aider à travailler en pente notamment.
Sa femme a quitté son poste pour venir travailler avec lui. Ils se lancent dans le gîte à la ferme et la culture du safran.
En 2009, une partie de son cheptel était descendue passer l'hiver dans la Sainte-Baume (Var) comme chaque année. Attaque de loups. "Les brebis étaient dans une zone rocheuse, elles ont paniqué, certaines ont sauté dans le vide". Bilan: plus de 50 mortes, quinze agonisantes achevées à la main.
"J'en garde un souvenir abominable. Je n'ai pas compté le nombre de pattes cassées, de brebis qui ont avorté". Certaines, minées par le stress, ne fournissaient pas de lait à la naissance de leurs bébés.
Ce cinquantenaire au visage doux et aux pommettes rosées, reste sceptique quant au retour du loup dans France. On dit qu'il est revenu tout seul en 1992 dans le Mercantour. Lui en doute.
Dans les années 30, les agriculteurs avaient éradiqué le loup. Depuis 20 ans, il est de retour et ne cesse de gagner du terrain hors des massifs montagneux, en Ardèche, Haute-Loire, selon l'éleveur.
Aujourd'hui, 250 loups sont recensés dans l'Hexagone avec une aire de répartition qui augmente de 25% par an.
Ces "prédateurs" ont un coût économique: environ 30 euros par brebis, évalue l'éleveur qui vend ses agneaux un peu plus de 100 euros pièce. Mais le prix est surtout psychologique.
"Tous les étés, après le 15 août, dès que le téléphone sonne, c'est pas pareil". Ses brebis partent pâturer dans la montagne près du col de Larche, à la frontière avec l'Italie, de juillet à fin septembre.
A la fin de l'été, les louves apprennent à leurs louveteaux à chasser et s'attaquent aux troupeaux. Des morsures, blessures et quelques morts chaque année.
"Ce qui est difficile à vivre, c'est la peur que ça se reproduise".
La Mutualité sociale agricole (MSA) de la Drôme a mis en place une cellule pour aider "la détresse psychologique des éleveurs".
Au salon, M. Dieny, secrétaire général de la Fédération nationale ovine, a participé à la projection d'un film pour sensibiliser sur le sujet.
Pour lui, les récentes annonces du gouvernement visant à éduquer le loup vont dans le bon sens. "Pour le dissuader, il faut lui faire comprendre que s'il nous attaque, il risque sa peau".
Mais il faudrait que le loup ne soit plus considéré comme une espèce protégée. "Aujourd'hui, si j'en tue un, je risque la prison alors que les meutes sont à saturation".
En 2012, près de 6.000 bêtes ont été victimes du loup, contre presque 5.000 en 2011 et seulement 2.680 en 2008.
Source: AFP/Sciences et avenir du 4 mars 2013