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Audrey Garric, journaliste engagée qui se dit elle-même «écolo» et qui parle du loup en restant derrière un écran d'ordinateur,nous fournit toujours des éclairages très orienté proche du militantisme très rarement neutre. Dans ce cas, elle ne s’est pas beaucoup foulée professionnellement en reprenant les arguments du belge Baudouin de Menten de la Buvette des Alpages. Elle n’a pas peur de reprendre des inexactitudes, parfois proche du mensonge, et ne cherche pas beaucoup à réfléchir.

Lorsqu’il s’agit de grands prédateurs, ours, loups, lynx, Audrey Garric réfléchi si peu qu'elle lance "dix vérités et contre-vérités sur le loup" sans même vérifier ses sources et en faisant des interprétations étonnantes. Sa réflexion est si médiocre qu’elle occasionne une réaction de Laurent Garde, écologue, Responsable du programme Recherche-Développement du CERPAM. Mais de cela, elle s’en moque comme à son habitude.

Elle part également sur des idées fausses mais néanmoins officielles. Elle écrit: «Avec un rythme de croissance de 20 % par an, la population de Canis lupus – revenue naturellement en France en 1992 par les Alpes après avoir disparu dans les années 1930 du fait de la chasse…» A la réflexion, son propos ne tient pas un instant la route et il faut quand même se référer à l’histoire au lieu de vouloir la réécrire à sa convenance. Le loup n’a pas disparu du fait de la chasse mais d’une volonté, depuis plusieurs siècle, de l’éradiquer. C’est d’ailleurs une des raisons, déjà sous Charlemagne, de la création des «Lieutenants de louveterie». Par ailleurs, de nombreux témoignages et faits d’abattages prouvent qu’il y avait déjà des loups avant 1992 et même 1990. Pourquoi n’oriente-t-elle pas ces investigations dans ce domaine au lieu de reprendre les arguments d’un illustre écolo sectaire? Par ailleurs, imaginer que le loup se développe à partir d’un couple vu en 1992 est d’une profonde naïveté voir même ignorance. Si tel était le cas, la consanguinité aurait vite fait d’éliminer l’espèce. Or, c’est à partir de cette date qu’elle s’est développée. Pourquoi? Selon des spécialistes de l’ONCFS, il fallait à la base une population de 6 à 12 loups pour éviter tout problème génétique. Donc, cessons de croire à la génération spontanée en 1992. Mais croyons plutôt à une mise en scène médiatique au profit d’une revue en recherche de scoop. Demandons-nous pourquoi est apparue cette explosion de la population de loups à partir de 1992 et non avant une croissance de 20% Et pourquoi aussi des loups ont été trouvés en captivité sans aucune suite judiciaire????

Autre mensonge sur la base d’estimations écologiste lorsqu’elle écrit: «En comparaison, quelque 400 000 brebis meurent chaque année au niveau national de maladies, d'accidents sur les alpages, de la foudre, selon les estimations de France Nature Environnement». Quelles sont les moyens d’estimation de FNE sur des causes de mortalité qui ne font jamais l’objet de statistiques? Pourquoi prendre des estimations écologistes et non celles des éleveurs si elles existent? Et puis comparer une mortalité sur les troupeaux de l’ensemble de la France alors que le loup ne concerne que 24 départements dans des proportions très inégales c’est faire preuve d’une profonde mauvaise foi et d’un profond mépris à l’égard des éleveurs qui en subissent les conséquences.

Nous n’irons pas plus loin dans l’analyse de la médiocrité de cet article. La réponse de Laurent Garde est suffisamment significative d’un comportement de manipulation de la part de cette journaliste sans grand scrupule pour le respect déontologique de la profession.

Louis Dollo, le 15 mars 2014

- Dix vérités et contre-vérités sur le loup

Les partisans et opposants au loup continuent de montrer les crocs. Dernier épisode en date, une brochure intitulée Le loup. 10 vérités à rétablir, diffusée lors du Salon de l'agriculture par les Jeunes Agriculteurs, la FNSEA, la Fédération nationale ovine et l'assemblée permanente des chambres d'agriculture, "pour mieux comprendre ce que vivent au quotidien les éleveurs dont les troupeaux sont soumis à prédation par le loup". Une plaquette qualifiée de "politicienne, démagogique et rétrograde" sur le blog de Baudouin de Menten, militant des associations de défense de grands prédateurs Ferus et l'Aspas. Alors, quelles sont ces "vérités" sur le loup? Décryptage de la brochure point par point.

- 1/ «Non, le loup n’est pas une espèce rare et menacée»

A l'échelle internationale, le canis lupus n'est effectivement plus une espèce menacée: après avoir longtemps été "vulnérable", il est classé depuis 2004 dans la catégorie "préoccupation mineure" de la liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui constitue l'inventaire mondial le plus complet de l'état de conservation des espèces.

Mais dans certains pays européens, et particulièrement en France, le loup reste menacé. Il est ainsi classé dans la catégorie "vulnérable" de la liste rouge des mammifères menacés dans l'Hexagone, établie en 2009. "Lors de la prochaine évaluation prévue dans deux ans, la question se posera de savoir si le loup reste dans cette catégorie, qui concerne des effectifs supérieurs à 250 individus adultes, ou s'il est rétrogradé en 'quasi-menacé'", explique Florian Kirchner, chargé de mission Espèces menacées pour l'UICN. Mardi 4 mars, un rapport d'information parlementaire a préconisé de rétrograder le prédateur d'espèce "strictement protégée" à "espèce protégée simple".

Avec un rythme de croissance de 20 % par an, la population de Canis lupus – revenue naturellement en France en 1992 par les Alpes après avoir disparu dans les années 1930 du fait de la chasse – regroupe aujourd'hui autour de 250 individus en France répartis dans 24 départements. Cette espèce se développe en raison de la croissance des forêts, de la nourriture abondante et diversifiée (le nombre d'ongulés sauvages est en hausse depuis trente ans) et d'un statut de protection favorable, avec la convention de Berne de 1979 et la directive Habitat Faune Flore de 1992. "Néanmoins, la croissance actuelle de cette population ne se situe pas à son maximum biologique, de 40 %", comme l'expliquait dans un entretien au Monde Eric Marboutin, responsable des études sur les loups et les lynx à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS).

- 2/ «Oui, ce sont des loups qui tuent les moutons, pas les “chiens errants”»

Les statistiques des prédations de moutons par des loups sont fiables et agrégées à l'échelle du territoire, puisqu'elles donnent lieu à des indemnisations des éleveurs par l'Etat. Rien de tel pour les chiens errants, dont les attaques sont seulement relayées de temps en temps par la presse locale. Si quelques études ont été produites sur la question, aucune n'a fait totalement référence. En 2005, un rapport de Ken Taylor estimait que 30 000 moutons et 5 000 à 10 000 agneaux étaient tués par des chiens errants chaque année en Grande-Bretagne, où le loup est absent. En 2009, une autre étude de Jorge Echegaray et Carles Vila, publiée dans Animal Conservation, indiquait que les chiens non contrôlés peuvent être responsables d'attaques sur le bétail, "contribuant à l'image négative envers la conservation des loups", même si leur estimation est malaisée.

"Les prédations des chiens, moins marquantes sur le plan psychologique que celles de loups, existent et sont souvent sous-estimées, estime le géographe et spécialiste des grands prédateurs Farid Benhammou. Malgré tout, quand le troupeau se situe dans un secteur où une meute est installée, il y a plus de chances que ce soit les loups."

- 3/ «Oui, les dégâts des loups sur l’élevage sont très importants»

Les attaques imputées au loup sont effectivement en augmentation en France: 6.786 bêtes ont été tuées en 2013, contre 5.848 bêtes en 2012 et 4.920 en 2011, selon les chiffres provisoires (pour l'an dernier) de la Direction régionale de l'environnement Rhône-Alpes, qui comptabilise les attaques au niveau national.

Si le chiffre est important dans l'absolu (sans compter le stress sur les autres bêtes et le traumatisme des éleveurs, dont certains sont touchés de manière répétée), il l'est bien moins en valeur relative: ce sont ainsi 0,08 % des 7,5 millions de brebis que compte le cheptel français qui ont été tuées par des loups. Et même en se limitant aux ovins situés dans les 24 départements où le loup a une présence permanente ou ponctuelle, à savoir 2,9 millions de têtes selon les chiffres de 2010 transmis par l'Institut de l'élevage, le pourcentage d'attaques reste extrêmement faible: 0,2 % des brebis ont été touchées (soit 2 sur 1.000).

En comparaison, quelque 400 000 brebis meurent chaque année au niveau national de maladies, d'accidents sur les alpages, de la foudre, selon les estimations de France Nature Environnement. "Le loup peut, certes, être une contrainte de plus pour les éleveurs et les bergers, mais il ne représente pas une menace économique pour l’élevage ovin, qui doit faire face à des difficultés bien plus importantes", estime l'association. Par ailleurs, la moitié des brebis françaises finissent dans le circuit de l’équarrissage, selon France AgriMer.

- 4/ «Oui, les éleveurs protègent leurs troupeaux, mais le loup s’adapte»

Le loup est effectivement un animal intelligent. Mais les éleveurs sont loin de tous protéger leurs troupeaux – souvent en raison de pâturages difficiles d'accès ou trop vastes. Ainsi, en 2013, 1.434 "contrats de protection" avaient été engagés par des éleveurs avec financement partiel par l'Etat et l’Union européenne. Ce qui reste peu lorsque l'on sait que les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et Rhône-Alpes, les plus touchées par les attaques, comptent à elles seules 6 000 exploitations, selon les chiffres du ministère de l'agriculture. "La cohabitation est aujourd'hui difficile en France car le savoir-faire face aux loups s'est perdu. Les éleveurs protègent moins leurs troupeaux que par le passé", estime Geneviève Carbone, ethnozoologue.

- 5/ «Oui, les chiens de protection deviennent un vrai problème»

Les chiens de protection des troupeaux, les Montagnes des Pyrénées, aussi appelés "patous", peuvent effectivement s'avérer agressifs "quand ils n'ont pas reçu la bonne éducation et le bon suivi technique", indique Farid Benhammou. "Dès qu'ils sont chiots, on doit les placer au milieu des brebis et agneaux, corriger leur comportement, et leur indiquer quelles sont les menaces pour les troupeaux, poursuit-il. C'est un moyen de protection efficace, mais qui n'est pas la panacée."

- 6/ «Non, cela ne se passe pas bien avec les loups dans les autres pays européens»

En Roumanie (où vivent 2 500 loups), en Espagne (2 000 spécimens) et en Italie (entre 500 et 800), les attaques de cheptel sont plus rares qu'en France. "Les loups n'ayant jamais disparu de ces pays, les éleveurs et populations y sont habitués", explique Farid Benhammou. Mais il est vrai qu'en Espagne, la cohabitation crée quelques tensions dans les nouvelles zones de colonisation du loup."

Dans ce pays, comme le relève la brochure des éleveurs, 200 loups – soit 10 % de la population – sont légalement tués chaque année. "Pourquoi la France, seule avec l’Italie, s’enferre-t-elle dans le pari impossible d’un loup gentil qui comprendrait tout seul qu’il ne doit pas tuer les agneaux?", questionnent les éleveurs français. En réalité, en France, le plan national loup 2013-2017 prévoit que 24 loups peuvent être tués chaque année, soit la même proportion de prédateurs qu'en Espagne. Reste, effectivement, que le quota n'est pas "rempli" (7 loups ont été tués en 2013), la procédure de tirs étant très encadrée et souvent difficile à mettre en œuvre. Sans compter qu'elle n'entraîne pas forcément les résultats d'"éducation" escomptés, les loups tués n'étant pas à coup sûr ceux responsables d'attaques.

- 7/ «Oui, l’élevage de montagne résiste bien, si on ne lui impose pas le loup»

"En 2013, dans un contexte de baisse des effectifs ovins dans les exploitations, la production ovine était inférieure de 3 % à celle de 2012", relève l'Agreste, le service de la statistique et de la prospective du ministère de l'agriculture, dans son rapport Ovins de février 2014. Cette baisse est régulière depuis vingt ans.

"Ce repli est essentiellement le fait d’une perte de compétitivité de la filière française aussi bien en amont qu’en aval", dans un marché dominé par l’Australie et la Nouvelle-Zélande, relève FranceAgriMer dans sa Réflexion stratégique sur les perspectives de la filière viande ovine à l’horizon 2025, publiée en décembre dernier. Et l'office agricole français d'égrener les points faibles de la filière: performances techniques souvent insuffisantes (naissances insuffisantes et mortalité importante des agneaux), coûts de production élevés (souvent du fait du prix élevé des céréales) et manque d’organisation et de compétitivité des outils industriels. En résulte "une très faible rentabilité économique de l’élevage ovin" et un revenu moyen des éleveurs ovins parmi les plus bas des éleveurs. Résultat: 50 % de la viande ovine consommée en France provient des importations. Nulle part dans ce rapport n'est mentionné des difficultés des éleveurs dues aux attaques de loups.

- 8/ «Oui, l’élevage de plein air est nécessaire pour les paysages et la biodiversité»

Tant les ovins que les loups sont nécessaires aux écosystèmes des régions. "S'il n'y a plus de moutons en alpage, ce sont 300 à 400 espèces végétales et animales qui disparaîtront en une dizaine d'années", estime le Centre d'études et de réalisations pastorales Alpes Méditerranée (Cerpam). L'entretien des alpages par les éleveurs préserve le paysage de l'envahissement par les broussailles, prévient les feux de forêt, limite le danger des éboulements.

Le loup, quant à lui, est considéré comme un régulateur écologique. "En s'attaquant d'abord aux animaux malades ou plus faibles, il contribue à la bonne santé d'une espèce et peut éviter des épidémies. Il aide par ailleurs à réguler les surplus de jeunes sangliers ou cervidés, qui peuvent menacer les forêts", explique Jean-François Darmstaedter, secrétaire général de Ferus, association de protection des loups.

- 9/ «Oui, le loup coûte cher au détriment des priorités de la biodiversité»

Effectivement, le choix de l'Etat de protéger le loup coûte cher. En 2011, le ministère de l'écologie a déboursé 1,5 million d'euros pour indemniser les éleveurs. A cette somme, il faut encore ajouter 6,3 millions d'euros de mesures de protection (gardiennage, chiens, enclos), soit 7,8 millions au total.

- 10/ «Oui, le loup pourrait s'en prendre à nouveau à l'homme»

Cela n'est pas l'avis des éthologues et historiens. "Les loups ne s'approchent pas des villages et sont invisibles la plupart du temps, explique Geneviève Carbone. Il y a eu quelques attaques sur l'homme, mais elles sont extrêmement faibles et surviennent dans des situations très précises, comme en Inde, où des jeunes enfants avaient été touchés quand ils étaient seuls et surtout très faibles. Il existera toujours un risque, comme avec les chiens." Il y a ainsi eu 33 décès en France entre 1990 et 2010 par morsures de chiens, selon les derniers chiffres publiés par l'Institut de veille sanitaire (INVS) en 2011.

Auteur: Audrey Garric
Source: LeMonde.fr du 5 mars 2014

- La précision de Laurent Garde pour le CERPAM

"S’il n’y a plus de moutons en alpage, ce sont 300 à 400 espèces végétales et animales qui disparaîtront en une dizaine d’années"…

D’ou tirez vous ces informations? Quel piètre travail journalistique…

- Voici la réponse complète du CERPAM

En réponse à votre demande, j’ai été très surpris et je me suis donc livré à quelques recherches pour identifier la source de cette information, puisque, même si nous avons mené un grand nombre de travaux sur le lien entre pâturage ovin et biodiversité dans notre région (Provence-Alpes-Côte d’Azur) notamment avec le Parc national des Ecrins, le Parc naturel régional du Luberon et divers labo universitaires, nous n’avons jamais mené d’études qui nous permettraient une telle conclusion et cette phrase ne figure dans aucun de nos rapports d’études, publication ni articles.

En fait, il s’agit à l’origine d’une confusion dans un article du Dauphiné Libéré du 26-07-2011 citant M. Francis Solda, président du CERPAM, et attribuant à sa structure la production de ce résultat. Or M. Solda n’évoquait pas là des travaux du CERPAM, mais des travaux du Parc naturel régional du Vercors tels qu’ils avaient été restitués oralement lors d’une rencontre ou table ronde par l’un de leurs agents. J’ignore bien évidemment si cette citation a ensuite circulé sur d’autres médias sous cette forme ou d’autres, et je ne sais pas quelle source a été utilisée dans cet article du Monde, j’avoue être extrêmement intrigué. En tout cas, cette source ne peut pas être attribuée au CERPAM qui n’a pas été consulté en cette occasion ni d’ailleurs en aucune autre occasion à ce sujet. Vous voyez comment on glisse insensiblement d’une citation où le président du CERPAM n’a en aucune façon déclaré que ce sont des travaux internes du CERPAM (et ce d’autant moins que nous ne sommes pas présents en Rhône-Alpes), à une affirmation de l’existence de travaux du CERPAM arrivant à une telle conclusion. Vérification des sources, inlassable exigence commune du chercheur comme du journaliste… En ce qui concerne le CERPAM, je suis en mesure d’affirmer que nous n’avons jamais énoncé ni publié une telle affirmation comme résultats de nos travaux. Vous trouverez par contre par recherche rapide sur internet de nombreux travaux de notre part sur le sujet, dont l’expression scientifique est forcément bien plus complexe. Dans le champ scientifique, c’est bien dans le cadre de nos rapports d’étude et de nos publications, et seulement dans ce cadre, que vous pourrez avoir connaissance du contenu de nos travaux. Vous pouvez d’ailleurs consulter notre «Lettre trimestrielle» sur notre site qui en fait régulièrement une présentation rapide.

Cordialement

Laurent Garde
Responsable du programme Recherche-Développement
Centre d’Etudes et de Réalisations pastorales Alpes-Méditerranée
570 Avenue de la Libération
04100 Manosque