Depuis qu'il a écrit son livre "Berger dans les nuages" en mai
2003, Joseph Paroix est considéré comme un pro-ours. Encore que les
sectaires du tout sauvage n'hésitent pas à l'attaquer sur ses prises de positions.
En fait, Joseph Paroix et sa compagne Anne Roland sont des bergers ossalois amoureux de leur pays, de leur vallée, de leurs montagnes. Ils aiment le travail qu'ils font auprès
de leurs brebis. Ce sont des passionnés et des protecteurs de leur milieu. Ils n'en parlent pas comme des rêveurs lointains parce que ce sont des acteurs permanents du terrain.
Ils savent faire la part des choses et exposer les problèmes avec discernement, réflexion et une logique pratique propre au "bon sens paysan".
Excellent professionnel reconnu par tous en Béarn, Joseph Paroix sait parfaitement le rôle que le pastoralisme joue dans le respect des écosystèmes de ces montagnes vivantes et
préservées.
A l'occasion de l'enquête publique lancée pour la modification du décret instituant le Parc National des Pyrénées, il a écrit sur le cahier d'enquête de sa mairie de Bilhère
un texte tout à fait remarquable que nous reproduisons ci-dessous.
Né il y a bientôt 40 ans dans la douleur, le parc national des Pyrénées aujourd'hui est une réalité incontournable de notre territoire.
S'il a surement contribué à la promotion touristique et au développement de notre région, il a sans aucun doute permis de sensibiliser le public à l'idée de maintenir une montagne vivante pour préserver un patrimoine d'une grande richesse.
Creé dans la difficulté, il a aussi porté de grandes espérances en promettant le developpement des zones périphériques. Ces espoirs ont été parfois déçus, comme beaucoup de rendez vous manqués. Ainsi on peut déplorer ces dernières années la destruction du camping de Bious Oumettes et celle du centre d'écologie montagnarde de Gabas.
Pourquoi aujourd'hui un nouveau décret qui renforce la présence des élus locaux au sein du conseil d'administration tout en restant minoritaires?
Pourquoi un nouveau décrêt qui renforce dans la zone coeur les pouvoirs du directeur du parc en privant les élus de tout pouvoir de police?
Pourquoi un nouveau décrêt qui fait passer toutes les décisions de développement et de travaux des élus sous les fourches caudines des pouvoirs du directeur et de son comité scientifique?
On ne trouve pas vraiment dans ce nouveau décrêt un souci de concertation et de gestion partagée. Cela crée vraiment un sentiment de spoliation de territoire et de sanctuarisation
qui bloquera tout projet économique ou pastoral.
Sur la gestion des sangliers par exemple, pourquoi ne pas envisager une collaboration avec les sociétés de chasse locales?
Sur l'agropastoralisme, il est bien de souligner son rôle essentiel dans la création et l'entretien des paysages et du patrimoine. Mais pourquoi regretter les "changements significatifs de pratiques"? Ne sont-elles pas dues à l'évolution de l'agriculture qui compte de moins en moins d'actifs et vit une conjoncture qui impose des exploitations et des troupeaux de plus en plus grands pour survivre.
Le maintien des pratiques d'élévages respectant les problématiques environnementales passe par le soutien des exploitations de montagne qui doivent rester nombreuses et
l'installation des jeunes. Il y a dans ce domaine des actions et des reflexions à mener avant de stigmatiser les changements de pratiques.
Pour la zone d'adhésion, qui risque demain de devenir zone de divisions et de conflits, entre ceux qui adhèrent et ceux qui refusent, entre les communes qui croient au projet
et celles qui n'en veulent pas, ne serait-il pas plus judicieux d'en écrire la charte avec les collectivités locales et tous les acteurs de la montagne?
J'ai vraiment du mal en écrivant toutes ses réserves sur ce décrêt parce que le concept du parc national est quelque chose à laquelle je crois. Parce qu'à travers mon vécu de
berger et de valléen, les gardes du parc ont toujours été des partenaires précieux, des amis importants et des soutiens les jours de brouillard et de pluie froide sur les
sentiers de la vie.
Pour moi ce sont des montagnards indispensables avec lesquels j'espère demain, pouvoir continuer à tracer des chemins d'avenir et inventer ensemble des lendemains sereins pour nos vallées.
Je tiens à dédier ces espérances à Jean Som parti un jour d'orage en m'aidant à rassembler mon troupeau. Je tiens aussi à remercier Rouchdy Kbaier (1) pour ses témoignages d'amitié et sa vision d'une montagne vivante.
Joseph Paroix
Note: (1) Rouchdy Kbaier a été directeur du PNP jusqu'au 30 juin 2008. Il a beaucoup oeuvré en faveur du pastoralisme et du maintien des pratiques ancestrales. Il était fortement contesté au sein même de l'administration du Parc alors qu'il était respecté par le milieu pastoral.
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