Il est aujourd'hui de bon ton de parler de transport ferroviaire. Le trafic des camions, en particulier dans les zones de montagne, a atteint un seuil intolérable.
En réponse à la mobilisation des riverains et des associations de défense de l'environnement, nous voyons fleurir toute sorte de projets visant à faire passer les camions sous les
massifs montagneux, via un transport sur rail, comme dans le cas du tunnel sous la manche. La traversée ferroviaire centrale des Pyrénées est un de ceux là.
Il s'agirait, d'après les premières études, d'un tunnel de 40 km pour un coût estimé de 37,5 milliards de francs.
Ce projet, bien que drapé de prétendues préoccupations écologiques et soutenu par le conseil régional Midi-Pyrénées et la commission européenne, est en réalité une fausse bonne
idée, échafaudée au mépris des espaces et des populations concernées et contraire à toute réflexion écologique sérieuse.
Il est en effet d'abord à souligner que ce type de solution conduit à ne transférer les camions vers le rail que sur une toute petite portion, celle du tunnel proprement dit. Bien plus cohérente serait une politique visant à organiser un fret ferroviaire directement de ville à ville, de pays à pays, alors que le fret par camion représente aujourd'hui 92 % du transport total de marchandises entre la France et l'Espagne
De plus, ce projet aurait pour effet d'impliquer et de justifier par avance tous les aménagements routiers vers les deux entrées du tunnel, saccageant ainsi de nouvelles vallées,
sans parler des gigantesques plates formes de transbordement nécessaires. Il induirait un afflux massif de camions au pied de ce tunnel, entraînant la création de couloirs à camion
dans les piémonts espagnol et français, alimentés directement par les nouvelles infrastructures autoroutières que sont l'autoroute Bordeaux - Pau, la traversée du massif central
(axe E7 Lyon - Toulouse) et le contournement autoroutier de Toulouse par le Lauragais.
Face au problème de passage entre la France et l'Espagne, il serait bien plus pertinent à nouveau, et bien moins ruineux, de moderniser et d'agrandir les voies existantes aux
extrémités Est et Ouest de la chaîne pyrénéenne.
Par ailleurs, la traversée ferroviaire centrale des Pyrénées s'inscrit une nouvelle fois dans une logique de croissance continue du trafic de marchandises. Elle est ainsi
"justifiés" par des prévisions de doublement du trafic de fret à l'échéance 2010, un triplement à l'échéance 2020. Mais ces prévisions ne reposent sur rien d'autre que la
simple projection des rythmes de croissance actuelle, comme si le trafic pouvait s'accroître indéfiniment.
Plus grave, une telle politique est contradictoire avec les engagements de la France lors du protocole de Kyoto, dans le cadre de la lutte contre l'effet de serre et le changement
climatique. Nous savons en effet que ce sont les transports qui constituent la principale source de gaz à effet de serre et que nous courrons droit à la catastrophe climatique
si rien n'est fait pour réduire notre consommation de combustibles fossiles.
De toute évidence, vouloir obtenir le transfert des marchandises sur le rail uniquement en zone de montagne est une option simpliste et incohérente car elle reviendrait, à terme, à accroître encore d'avantage le trafic routier et ses nuisances en amont et en aval.
Quelles alternatives?
Plutôt que de dépenser des sommes colossales dans un projet de tunnel pharaonique et aux conditions de réalisation hasardeuses, nous proposons d'investir ces sommes pour le
développement des axes ferroviaires de fret en général, et l'aménagement des lignes existantes aux deux extrémités de la chaîne, là où l'essentiel des marchandises et des camions
transite actuellement, là où le relief naturel s'y prête le mieux.
En effet, la France et encore plus l'Espagne sont sous équipées en terme d'infrastructures de fret ferroviaire et maritime et les deux traversées naturelles par Irun et le Perthus
sont loin d'être modernisées.
C'est sur le développement des réseaux ferroviaires globaux dans chaque pays que doit donc porter l'effort
Le basculement du fret en faveur du rail ou des voies navigables nécessite un réseau maillé à travers toute l'Europe, le passage des Pyrénées n'étant qu'un petit maillon dans ces
chaînes de transport.
Enfin nous tenons à réaffirmer qu'un véritable développement soutenable est totalement incompatible avec une croissance infinie des trafics. Cette simple règle de bon sens devraient amener les décideurs publics à s'interroger sur les prévisions démentielles de croissances du trafic qu'on nous propose, et leur prétendu caractère "inéluctable"...
Le Comité Somport Toulouse